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Santiago de Cuba - Juillet |
DANS les années 60, après la pachanga, sont très
vite apparus plusieurs rythmes et styles musicaux: le pa’ca, le pilón,
le dengue, et le plus sonore de tous, le mozambique, qui fit
trembler le front de mer havanais durant le carnaval (1964),
l’Olympia de Paris (1965), le Carnegie Hall (1979) et d’autres
salles de Manhattan.
Après 1959, avec l’arrivée de la Révolution, les congas (1) inondent les rues. En 1961, le compositeur santiagais Enrique Bonne monte l’orchestre populaire le plus grand du moment, avec 54 musiciens, chanteurs et danseurs ("Los Tambores de Bonne" NDLR).
Le 6 juillet 1963, le rythme mozambique fait son apparition au programme ´Rythmes de jeunesse`. À la tête du groupe se trouve Pedro Izquierdo (Pello el Afrokan), vêtu d’un impeccable costume de coutil blanc, d’un bonnet en peau de lapin blanc, et entouré de plusieurs danseuses qui font une démonstration de la nouvelle danse et de cinq tumbadoras, à la sonorité rappelant le piano.
« La danse - expliquait Pello - c’est comme marcher, marcher en cadence. Généralement, c’est le danseur qui crée, impose et exige la danse, ses pas deviennent l’élément le plus dynamique dans la formation d’un rythme, mais dans le cas du mozambique c’est le contraire qui s’est produit. J’ai utilisé pour ce rythme quelques éléments de danses cubaines folkloriques d’origine africaine.»
Le mozambique consiste en des sons produits par des tambours africains (boncó enchemiyá, obi apá), la conga et le tres-dos. Le chercheur cubain Odilio Urfé estimait que le mozambique part de la combinaison instrumentale de la conga carnavalesque. «Certains en étaient fous, disait Pello. Je l’ai fait dans le but d’éviter que la musique cubaine ne se laisse pénétrer par le son étranger de Paul Anka et j’ai voulu inventer quelque chose pour m’y opposer.»
Il ne fait aucun doute que le mozambique a laissé son empreinte dans la musique de danse cubaine, chez les percussionnistes qui renouvellent constamment la base des orchestres. Irakere a mélangé la conga au jazz et à la pop. Eddy Palmieri enregistre le mozambique Maria Caracoles, dont il y a eu des millions de disques vendus. Carlos Santana, roi du latin rock, l’enregistre avec orgue, batterie et guitare électrique. Il est également joué par les Japonais, parmi eux beaucoup de ses élèves, plus de 200, et notamment les musiciens de l’Orquesta de la Luz.
Pedro Izquierdo fut l’un de ces grands percussionnistes héritiers des forêts africaines. Sa grand-mère était une noire mandinga (mandingue) et son père l’un des percussionnistes de l’orchestre de Belisario Lopez. Son domicile était souvent le lieu de rencontre avec Agustin Gutierrez et de nombreux congueros et rumberos. Mongo Santamaria était le cousin de Pello et un maître du tambour.
L’Afrokan a travaillé comme percussionniste au cabaret Tropicana et il a enseigné à l’École nationale d’instructeurs d’art. À partir de 1959, il s’était consacré à l’expérimentation de tambours, et en 1967, il avait dirige un ensemble de cent tambours.
Au début de 1970, le mozambique ayant satisfait son objectif de départ, il réduit le format de son orchestre, s’introduit au cabaret Parisien avec le show latino-américain produit par lui-même. Il se produit au restaurant 1830, à la Cecilia, au Comodoro et au Capri, en 1961, avec plusieurs salseros.
Mais le mozambique est toujours vivant. Son petit-fils Merencio Izquierdo a repris un groupe, décidé à faire du mozambique ce qu’il était devenu en 1963 : «un virus et la plus joyeuse des épidémies», comme l’affirme un de ses chanteurs et compositeurs, Evelio Landa.
Rafael
LAM, pour Granma international (09/2000)
Traduction adaptée par Ritmacuba.com
Pello
el Afrokán est décédé le 8 décembre 2000
(1) congas de carnaval : formations de défilé
"Accompagnant le premier groupe français venu étudier la musique et le danse cubaine à Cuba, en 1988, moi et deux ou trois stagiaires, percussionnistes en devenir, reconnaissons Pello El Afrokán et il nous invite à sa table du restaurant de l'Hôtel Nacional. Devant notre appétit de savoir, il nous montre instantanément les frappes des divers tambours (et on sait qu'ils sont particulièrement nombreux) de la polyrythmie du Mozambique dont il était l'inventeur... sur la nappe de la table. Le bonheur! On peut imaginer la sympathie que j'ai gardé pour cet homme, fier de la culture de ses ancêtres africains et dont la vie était basée sur cette vocation : diffuser de la joie et de l'énergie." dc
A l'époque de la création de ce rythme, les pays africains accèdent à l'indépendance. Le Mozambique arrache la sienne au Portugal par la lutte armée de son front de Libération, le FROLIMO. En choisissant ce nom, Pello El Afokan à la fois rendait hommage, de manière générale, à la culture africaine léguée à Cuba (le Mozambique est située dans l'aire culturelle bantoue, résumée populairement par "congo" à Cuba, ainsi que l'Angola où ira ensuite se battre l'armée cubaine) et à une résistance nationale populaire à laquelle un fier Cubain ne pouvait être insensible au lendemain de la Révolution. Si le mozambique prétendait résister, comme d'autres nouveaux rythmes, au rouleau compresseur de la musique anglo-saxonne en période d'embargo (qui empêchait par ailleur l'exportation de la production culturelle cubaine) sa proposition d'orchestration - avec un nombre de tambours gargantuesque! - était complètement anti-commerciale! Avant la revolution cubaine, ce déferlement dans les media de tambours afrocubains venus des faubourgs n'aurait d'ailleurs pas été supportable (à l'extérieur de Cuba, il y a eu de commentaires dépréciatifs sur ce rythme pour la même raison ségrégative). Ainsi, le mozambique est conditionné dans tous ses aspects par le moment particulier où il est apparu. dc
El mozambique, como género musical cubano, surgió a fines de 1962 por inspiración de Pedro Izquierdo, conocido como Pello El Afrokán. Contó con la ayuda de los músicos cubanos Enriqueta Almanza y Rafael Somavilla, en lo referido a las partituras, e hizo su debut en la televisión el 6 de julio de 1963. Está fundamentado en raíces afrocubanas con elementos de rumba y conga, tambores batá y abakuá. Según Omar Terencio Izquierdo, nieto de Pello El Afrokán y continuador del mozambique, este es un canto a África y a su cultura, de ahí su nombre. Desde el punto de vista danzario semeja el andar de las personas, con meneos del pie, que se inician con la punta, y al que le siguen el apoyo del talón con un paso y una leve flexión de la pierna. Los movimientos se repiten una y otra vez y en ocasiones se gira despacio sin perder el compás de punta, talón y flexión. Estos pasos van acompañados de otros movimientos de caderas y rotativos de las manos. Las mujeres lo ejecutan de forma voluptuosa haciendo énfasis en destacar la agilidad de la cintura y el talle. Orquestalmente en sus orígenes fue un género con predominio de la percusión, y carecía de instrumentos armónicos. La armonía se daba a través de las voces (3 cantantes) y los metales. Utilizaba 4 trompetas, 3 trombones, 14 tumbadoras tocadas por 10 músicos, de ellos 4 ejecutaban las jimaguas (2 tumbadoras al unísono) y los 6 restantes una. Cada percusionista imprimía un golpe diferente a las tumbadoras dando un sonido poliritmico a las interpretaciones; utilizaban también 2 bombos de mano de los usados en las comparsas habaneras, 3 campaneros y un tocador de sartén. Las 14 tumbadoras se ubicaban delante de los cantantes, evidenciando así el carácter protagónico de la percusión dentro del formato. En el año 1970, en busca de mayor actualidad sonora, Pello incluyó el piano, el bajo y la guitarra eléctrica, mantuvo los trombones y las trompetas y simplificó la percusión, reduciendo el número de miembros del grupo. Pello el Afrokán, principal intérprete del mozambique, además de imponer un nuevo ritmo y manera de hacer la música cubana, revolucionó el mundo de la moda. Esta corriente danzaria dio origen a un típico peinado nombrado "María Caracoles", por la forma en que las jóvenes se enroscaban el cabello en la parte más alta de la cabeza, y al uso de una gorrita o pachanga en los varones. Desde sus comienzos se caracterizó por ser una orquesta espectáculo, al utilizar un cuerpo de baile integrado por 5 muchachas, que demostraban cómo se danzaba el nuevo género. Pello viajó a México, convirtiéndose en una de las orquestas portadoras de los estilos sonoros más gustados de esta Isla. Incursionó en otros países de América, Europa y África, donde también dejó huellas. El mozambique fue bailado, cantado y disfrutado en toda Cuba y hoy a 50 años de su nacimiento se prolonga en la orquesta de Pellito, nieto del autor del ritmo, quien mantiene vivo el género, aunque con adecuaciones actuales en correspondencia con lo más novedoso del boom cubano e internacional. (María Regla Figueroa Evans, Fuente : Radio Cadena Habana, 2019) |
Le
Mozambique, en tant que genre musical cubain, a
émergé à la fin de 1962 sous l'inspiration de Pedro
Izquierdo, connu sous le nom de Pello El Afrokán. Il a eu
l'aide des musiciens cubains Enriqueta Almanza et Rafael
Somavilla, en termes de partitions, et a fait ses débuts à
la télévision le 6 juillet 1963.
Il est basé sur des racines afro-cubaines avec des éléments de rumba et de conga, de tambours batá et abakuá. Selon Omar Terencio Izquierdo, petit-fils de Pello El Afrokán et continuateur du Mozambique, c'est un hymne à l'Afrique et à sa culture, d'où son nom. Du point de vue de la danse, il ressemble à la démarche des gens, avec des mouvements de pied, qui commencent par l'orteil, suivi par l'appui du talon avec un pas et une légère flexion de la jambe. Les mouvements sont répétés encore et encore et parfois on tourne lentement sans perdre le battement de l'orteil, du talon et de la flexion. Ces étapes s'accompagnent d'autres mouvements des hanches et de rotations des mains. Les femmes l'exécutent avec volupté, soulignant l'agilité de la taille et des hanches. Orchestral dans ses origines, c'était un genre avec une prédominance de percussions, sans instrument harmonique. L'harmonie a été donnée à travers les voix (3 chanteurs) et les cuivres. Il a utilisé 4 trompettes, 3 trombones, 14 tumbadoras jouées par 10 musiciens, 4 d'entre eux ont interprété les jimaguas (2 tumbadoras à l'unisson) et les 6 restantes. Chaque percussionniste a imprimé un rythme différent sur les tumbadoras, donnant un son polyrythmique aux performances; Ils ont également utilisé 2 tambours à main de ceux utilisés dans les comparsas de La Havane, 3 joueurs de cloche et un joueur de sartén (poëlles à frire doubles). Les 14 tumbadoras étaient situées devant les chanteurs, témoignant ainsi du caractère principal de la percussion au sein du format. En 1970, à la recherche d'un son plus actuel, Pello intègre le piano, la basse et la guitare électrique, conserve les trombones et trompettes et simplifie les percussions, réduisant le nombre de membres du groupe. Pello el Afrokán, le principal interprète du Mozambique, en plus d'imposer un nouveau rythme et une nouvelle façon de faire de la musique cubaine, a révolutionné le monde de la mode. Cette tendance de la danse a donné naissance à une coiffure typique nommée "María Caracoles", en raison de la façon dont les jeunes femmes bouclaient leurs cheveux sur la partie la plus haute de la tête et de l'utilisation d'un bonnet ou pachanga pour les hommes. Dès ses débuts, il a été caractérisé comme un orchestre de spectacle, utilisant un corps de danse composé de 5 filles, qui ont montré comment le nouveau genre était dansé. Pello a voyagé au Mexique, devenant l'un des orchestres qui exportait les styles sonores les plus en vue de l'île. Il est intervenu dans d'autres pays d'Amérique, d'Europe et d'Afrique, où il a également laissé des traces. Le mozambique a été dansé, chanté et apprécié dans tout Cuba et aujourd'hui 50 ans après sa naissance, il se prolonge dans l'orchestre de Pellito, petit-fils de l'auteur du rythme, qui maintient le genre vivant, bien qu'avec des ajustements actuels en correspondance avec le plus innovant du boom cubain et international. (María Regla Figueroa Evans, Source : Radio Cadena Habana, 2019) |