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Mise
en ligne de la première édition : le 10/11/2017. Deuxième édition
augmentée le 09/06/2020. Dernière modification 25/09/2024.
La
page avec tous les textes du site (dont d'autres textes de Daniel
Chatelain & Daniel Mirabeau)
1. La tumba francesa, une tradition musicale cubaine
2. Les Français en provenance de Saint Domingue
3. Le patois, la langue des Français de Cuba
4. Chants des sociétés de tumba francesa
4.1
Chants à caractère historique
4.2 La vie dans la société de tumba francesa
4.2.1 Fête
et activités
4.2.2
Piques et compétitions entre les chanteurs
4.2.3
Hommages aux défunts
4.3 Situations dramatiques et peinture sociale
4.4 L'homme face à la force de la Nature
4.5 Chants à connotation religieuse
4.6 Sur Haiti et les Haïtiens
4.7 Chansons politiques post-révolution
socialiste
Annexe
: Sur les composés des
différentes sociétés de tumba francesa
5. Bibliographie sélective
6. Discographie sélective
7. Documentaires
8. Vidéos
9. Remerciements
10. Liste alphabétique des chants
- vous trouverez avantage à utiliser les 245 appels de note en lien hypertexte, lesquelles contiennent une bonne partie des informations factuelles sur les termes spécialisés et le noms propres.
- les liens musicaux en mp3 s'ouvrent sur une nouvelle fenêtre ou onglet et vous permettent de continuer la lecture en la confrontant à l'écoute.
Avant
le processus de l'inscription au patrimoine immatériel de l'humanité
de la tradition de la tumba francesa, abouti en 2008[1],
un tout petit nombre d'études détaillées spécifiques, ethnographique ou
musicologiques; sur la musique de la tumba francesa avaient été
réalisées :
- En espagnol :
Peu
avant la Révolution cubaine, Elisa Tamames soutient sa thèse Folklór
cubano: la poesia en la tumba francesa, dont le texte restera
peu utilisé dans la documentation cubaine, à part deux chapîtres
publiés au début des années '60 dans la revue Actas del Folkore. Cette
thèse fait suite à un travail de terrain auprès de membres de la
société de tumba francesa La Pompadour à Guantanamo. Elle s'intéresse
plus particulièrement aux chansons et nous en livre vingt-cinq. Les
traductions qu'elle propose du créole vers le castillan éclairent sur
le sens général des chansons, mais ne résistent pas à une étude
détaillée du texte. Cela nous amène à penser qu'elle privilégie les
explications générales que lui ont donnés les chanteurs, plutôt qu'une
traduction linéaire des textes. Deux arguments nous ont décidés à
insérer dans cet article tout les chants collectés par Tamamés. Le
premier est la confidentialité de l'ouvrage: il existe un seul
exemplaire du texte intégral intégral de sa thèse, disponible à la
Bibliotèque Nationale de La Havane. La deuxième raison est de
soumettre ici notre propre tentative de traduction, qui vient
compléter le travail de Tamamés.
Il faudra attendre ensuite plus de vingt ans avant qu'un autre
musicologue publie sur la tumba francesa. En 1977, Olavo Alén sort un
article s'appuyant sur un travail de terrain dirigé par León
Argeliers. En 1986, suite à un travail universitaire à Berlin, Alén
publie l'un des fleurons
des études musicologiques
cubaines : La música de las sociedades de tumba francesa en Cuba (prix de
musicologie de la Casa de las Americas).
A partir de l'inscription par l'UNESCO des sociétés de tumba francesa
au patrimoine mondial culturel immatériel, vont paraitrent de
nouvelles publications:
Un CDRom très complet est édité en 2002 sur les tumba francesas suite
au travail de toute une équipe de chercheurs sous la direction de
Maria Teresa Linares.
Quasiment au même moment, Laura Cruz publie différents articles suite
à des terrains menés à Santiago, Guantanamo et Bejuco.
Enfin, en 2013 et 2015 Manuel Coca Izaguirre et son épouse Greysi
Perez Martinez vont également être à l'origine de deux publications
importantes. L'une est une biographie de la vie de Leonor Terry, reine
de tumba francesa, l'autre une thèse universitaire sur les chants de
tumba francesa, sujet qui nous intéressera directement tout au long de
cet article. Il y a eu eu d'autres publications depuis, hormis un
article sur les tumbas francesa de Santiago de Cuba paru dans la revue
Del Caribe en 2017.
Percussionnistes de La Pompadour. Au centre, Angel Videau Terry "Cucú" au bula. 1976 © Wilfredo Barbán.
-
En
français l'article
de 24 p. de Daniel Chatelain publié dans deux livraisons de la
revue Percussions en 1996, nourri entre autres des deux premières
publications cubaines et d'étude de terrain faîtes à partir de 1993.
Sont
à ajouter à ces écrits, ces films documentaires : (des liens pour y
accéder sont disponibles à la fin de cet article)
- La tumba francesa, Orlando
Jimenez Leal et Nestor Almendros, 1961, 9 mn. Une captation récemment
restaurée d'une suite jouée et dansée par La Caridad de Oriente
(Santiago de Cuba). Pas de commentaires, hormis un carton
d'introduction par Odilio Urfé.
- Tumba francesa, Sergio
Villafuerte, 1979, 18 mn. Le premier film scénarisé avec commentaires
en voix "off". Rencontre des sociétés La Pompadour et La Caridad de
Oriente . Nous reconnaissons entre autres à l'image: Pablo Valier
(célèbre chanteur soliste) et Emeregildo Videau Cucú (au
tambour) pour la partie Guantanamo. Présente également la famille
Venet sur trois générations (Tecla, Yoya, Andrea) pour Santiago.
- De la plantation de café à la
tumba francesa, Jean François Chalut, 2013, 39 mn. Le
réalisateur canadien réunit ici les trois sociétés en activité; de
nombreuses entrevues et commentaires avec des spécialistes de la
culture française à Cuba.
-
La voz de los sin voz, Sergio Guzetti & Leandro
Maldonado, 2013, 41 mn. L'équipe de réalisation argentino-cubaine
a ici centré son travail sur la société de Bejuco. De nombreux
commentaires dont ceux du musicologue Olavo Alén, ainsi qu'un
aperçu rafraîchissant de la vie dans les montagnes à l'orée de
Sagua de Tanamo.
- Antes, ahora y después,
fragmento de la vida de Andrea Quiala Venet, Olaf Gesler,
2016, 140 mn. Entrevues avec Andrea Quiala, présidente de la
société La Caridad, ainsi que de nombreux extrait de spectacles
filmés.
Un trait saillant des tumbas francesas est leur apparente
double nature :
-
le
point
d'origine des plantations de café créés à Cuba par les réfugiés de
Saint-Domingue, créées par les planteurs de la colonie française
pré-révolutionnaire réfugiés, eux-mêmes souvent métissés et de ses
compagnons d'exil esclavisés, sinon Noirs et Métis affranchis, avec la
transportation de leur créole. (cf
chapître 2)
- Le résultat du processus historique qui en fait une tradition purement cubaine, utilisant ce créole connu pendant un siècle et demi par ses locuteurs sous le nom de patuá ou patois, transformé à Cuba par de nouvelles injections de Français et la contamination de l'espagnol ambiant. (cf chapître 3)
Un exemple significatif de cette nature duale est dans les
instruments utilisés (uniquement percussifs). Les membranophones, les
tumbas ont des traits qui les rapproche des tambours haïtiens du vodou
(tension par des chevilles, vocabulaire utilisé etc), mais n'ont
absolument pas leurs proportions. De sorte qu'un maître-tambour
haïtien ne les reconnaît pas comme siens.[2]
Ce sont les plus grands tambours de Cuba, non confondables avec
d'autres tambours afro-cubains. Pour employer le vocabulaire et
concept de Fernando Ortiz, père des études afro-cubaines, ils ont
connu à Cuba un processus de transculturation, dont un agrandissement
de la taille, qui les rend uniques.
Cuba, l'île la plus étendue des Caraïbes a
toujours été, par sa position géographique, un passage stratégique
pour tout commerce maritime. Cette porte d'entrée des Amériques a
souvent été convoitée par les grands Etats européens. La France et
l'Angleterre s'y sont opposées aux Espagnols[7],
qui occupent l'île depuis le XVIe siècle et jusqu'à son
indépendance. Cette alternance de
conflits et relations commerciales donneront lieu à des
mouvements migratoires vers Cuba, dont la population reste malgré tout
peu dense au XVIIIe s., en particulier dans sa zone
orientale[8].
La population d'origine française qui s'installera avant 1789
dans la région, est formée d'ingénieurs,
de négociants ou de planteurs. Ces derniers trouvent alors une terre
agricole encore peu exploitée, à des prix beaucoup plus bas que ceux
pratiqués dans les Antilles françaises. A cette époque, l'agriculture
et l'élevage bovin sont les principales ressources de l'île. En effet,
il y aura peu d'exploitations minières hormis celles de cuivre[9].
Cuba n'est pas une terre riche en métaux précieux et ne répondra pas
en cela à sa quête frénétique par l'empire espagnol.
Cette présence française à Cuba reste sporadique et peu significative
jusqu'aux troubles à la fin du XVIIIe s. sur l'île de
Saint-Domingue. Avec les luttes révolutionnaires et
l'indépendance du jeune Etat d'Haïti s'amorce la débâcle de
l'oligarchie créole de l'île. Dans cet exil que la plupart pense
momentané sont privilégiées des destinations proches où les conditions
économiques et politiques sont les plus accueillantes. Beaucoup
partiront au plus près, c'est à dire dans le Sud de Cuba. Nous
trouvons également un exil significatif en direction du Venezuela,
Trinidad et Tobago, Puerto Rico, en Jamaïque, ainsi qu'en Louisiane et
Floride[10].
Peu rentreront en France, la traversée est aussi coûteuse que risquée.
Par ailleurs, beaucoup ont plus le sentiment d'appartenir à cette zone
caribéenne qu'à la métropole.
La plupart des familles blanches ou métissées qui débarquent dans la
baie de Santiago, ou à Baracoa (actuelle Province de Guantanamo) sont
désargentées. Elles ont quitté Saint-Domingue à la hâte en abandonnant
leurs biens, sauf quelques titres de propriétés et créances,
accompagnées par une partie de leur gens de maison et ouvriers, qu'ils
soient hommes libres ou esclaves. Parmi
eux quelques bossals[11],
mais surtout des Noirs créoles, des mulâtres et des quarterons[12].
Concernant le regard sur les Noirs venant de Saint-Domingue et les
mesures des autorités cubaines prises envers eux, cela diffère en
fonction de l'ethnicité et du statut marchand de ces derniers. En
effet, les bossals, Noirs fraîchement débarqués d'Afrique sont
considérés dociles[13],
tandis que Noirs créoles et mulâtres sont présumés indolents et déjà
pervertis par les idées révolutionnaires, qu'elles soient celles de la
jeune république d'Haïti ou de la Révolution française. Pour les
créoles, la descente de bateau en baie de Santiago débute souvent par
un séjour à la forteresse del Morro qu'ils soient esclaves ou
non, avant la mise en oeuvre de leur expulsion. Cependant, malgré la
volonté des autorités de contenir la vague migratoire de cette
population par des mesures coercitives, ils ne parviennent bientôt
plus à en contrôler l'entrée. Sont recensés officiellement en 1808 à
Santiago 2457 esclaves Noirs et mulâtres, représentant 33% des
Français à Santiago[14].
De plus, dès ce moment cette population ne concernait plus s ville de
Santiago et les hauteurs proches mais avaient essaimées, en
particulier à l'Est, autour de Saltadero (future Guantanamo).
Au début du XIXe siècle, le développement intensif de l'agriculture, en particulier celle du café chez les planteurs français nécessite une forte main d'oeuvre au meilleur coût[15]. Des créoles libres de Saint Domingue sont alors attirés par ces opportunités d'embauches. Certains préféreront suivre leurs anciens maîtres dans leur exil et s'embarquent avec eux pour Cuba. Ce sont ces créoles qui créeront les premières sociétés d'entraide et de secours mutuel pour les « Français ». De ces sociétés, la première recensée remonterait à 1796[16] à Santiago.
Les
membres déclarés de ces sociétés sont tous des hommes libres, ou dont
la communauté a acheté la liberté[17].
La présence d'esclaves créoles y est très mal tolérée, les autorités
craignant une contagion d'idées avancées issue de leurs
fréquentations. L'arrivée des créoles de Saint-Domingue jusqu'en 1809[18]
contribuera
aux mouvements d'émancipation des Noirs et au marronnage, en
particulier dans la zone orientale de Cuba. Nous verrons
ultérieurement que bon nombre de chansons de tumba francesa ont pour
thème le marronnage, la sédition des esclaves, l'amélioration des
conditions de vie des Noirs.
Malgré
l'ordonnance royale de 1809, des Français resteront sur l'île. En
effet, le gouverneur de Santiago était plutôt enclin à la
naturalisation de ces derniers, en particulier pour les riches
familles françaises implantées dans l'économie locale[19].Certaines
n'ayant pas adoptées la nationalité espagnole resteront tout de même
sur place, le cabildo[20]
n'avait pas les moyens humains de faire intervenir la troupe dans les
zones reculées de la Sierra Maestra où se trouvaient certaines
plantations françaises.
L'aristocratie espagnole de Santiago restera friande de l'aura de raffinement dont est nimbée la culture française de l'époque, s'entourant de précepteurs de France pour l'éducation de sa progéniture, de toilettes de Paris pour ces dames, elle sort dans les cafés-concerts tenus par des français. Les Blancs vont parfois s'encanailler en assistant aux « danses nègres »[21]. Nous verrons par la suite que les différences musicales et chorégraphiques sont parfois minces entre les contredanses françaises et ce que développent les Noirs créoles des sociétés de tumba francesa.
Par
ailleurs, une autre partie de l'aristocratie espagnole tolère mal
l'arrivée massive des Français ou y est franchement opposée. L'évêque
de Santiago, Joaquin Osés de Alzúa y Cooparacio est de ceux-ci, il
sera même à l'origine de cabales et troubles anti-français[22].
Ils leur reproche leur manque de religiosité (certains sont des
huguenots, ou libres penseurs) et est fermement opposé à l'esclavage.
Tout au long du XIXe s. et jusqu'à l'abolition, les planteurs français intensifieront la traite négrière sur la zone orientale de Cuba, le développement des cultures sucrières et du café nécessitant toujours plus de main d'oeuvre. Nous voyons dans cette communauté française de Cuba des différences idéologiques et politiques assez marquées avec les métropolitains. Ils sont souvent nostalgiques de la royauté et peu en phase avec les idées abolitionnistes. Ceux abandonnant le statut de réfugié provisoire pour véritablement s'installer à Cuba défendront alors bec et ongle leur patrimoine et statut social, échaudés par le goût amer de la débâcle haïtienne. Des contradictions idéologiques y ont cependant cour, affaiblies au départ par l'intérêt économique. Les premiers Français installés pouvaient chanter à la suite dans leurs réjouissances du café-concert du Tivolí l'hymne de Saint-Louis et la Marseillaise ! Ainsi, en dépit de l'intérêt immédiat des propriétaires d'esclaves, les débats d'idées amènent des membres de la communauté à favoriser le développement de la franc-maçonnerie, déjà très présente à Saint-Domingue, favorisant par la suite les idées indépendantistes qui germeront en son sein.
Parmi
le multiples influences culturelles françaises dans l'Est de Cuba, il
en est une qui concerne directement notre sujet et que nous révèle le
voyageur Hippolyte Piron. Il s'agit d'une pratique chorégraphique liée
historiquement aux tahonas rurales et actuellement pratiquée dans le
salon de la tumba La Caridad de Santiago : le tressé-ruban. La
citation suivante n'est pour autant pas reprise dans l'historiographie
et c'est pourquoi nous en faisons cas pour terminer ce chapître : "Il
y a une trentaine d'années, l'aristocratie et la finance (la fine
fleur de la Ville), se déguisaient et s'amusaient avec un excessif
entrain. Elles oubliaient tout pour se livrer entièrement au
plaisir. Les vives couleurs du satin brillant des costumes
plaisaient aux femmes; leur coquetterie y trouvait son compte; elles
mettaient un soin passioné à bien se parer. Que de coeurs elles
transperçaient ces jours de fête, où elles déployaient toute leur
grâce.(...) On allait dans les meilleures maisons; on plaçait au
centre de la plus grande pièce la haute perche peinte et dorée qui
portait, attachés à la pointe, de nombreux rubans étroits, pendant
jusqu'à terre. Chaque masque prenait un bout de ces rubans et
dansait en le tressant autour de la perche. Ce divertissement un peu
puéril est étrange et pittoresque; il a sa couleur locale, son
charme particulier. Mais depuis quelques années, ces plaisirs
étaient abandonnés au monde intermédaire et au peuple. A l'époque
dont je parle, c'était encore les masques les plus distingués qui se
réunissaient par comparsas et tressaient les rubans." (H. Piron,
1876 pp. 197-198).
Ce témoignage des années 1830 confirme le tressé-ruban ou cinta
comme danse française passée par Saint-Domingue dans l'histoire de
cette partie de Cuba. Cette tradition était sortie des salons pour
être pratiquée dans les tahonas et à leur tour des immigrés haïtiens
du XXe siècle la pratiquèrent dans leurs regroupements
communautaires ruraux. Grâce à la tumba La Caridad, elle a réintégré
le salon de danse dans la deuxième moitié du siècle dernier (cf. le
chant "Ven mi morena", partie
4.2.1) et les troupes de folklore afro-cubains professionnelles ou
amateur en ont fait à leur tour un moment-phare de leurs spectacles.
Si l'on compare le français d'usage à l'époque en métropole, la grammaire est simplifiée, les tournures de phrases sont courtes[24] et un vocabulaire parfois suranné. Les français blancs caribéens parlaient souvent deux langues, le français et le créole. La pratique de ce dernier était plus simple pour s'adresser à leurs esclaves, mais il devient progressivement d'usage habituel et plus apprécié que le français, ou une façon de se démarquer de ces Français de France, dont beaucoup se sentent extérieurs. La correspondance entre planteurs est cependant en français châtié.
La transculturation dans l'environnement linguistique espagnol transformera peu à peu le créole originel dominguois des exilés pour donner naissance à un nouveau dialecte vernaculaire, où des expressions cubaines seront de plus en plus présentes.
La finca de mi abuela, tableau d'Osmar Peña Clavel, 2015, Santiago de Cuba.
Les planteurs français s'entourent de domestiques dominguois parlant créole. C'est par l'observation, le partage passif des festivités et de la vie des maîtres, dans des plantations réputées par leur intense vie culturelle, que les gens de maison Noirs créoles vont s'approprier des éléments culturels européens. Cette transculturation à l'intérieur du cadre de la maison coloniale était déjà entamée dans la Saint-Domingue française, futur Haïti, avant l'exil de tous en terre cubaine. Elle s'accentuera avec l'installation des Français à Cuba, la cellule de la propriété coloniale française étant alors la seule où se pratique le créole. C'est sur les grandes étendues planes en quadrilatère des séchoirs à café et dans les salles à trier le grain qu'auront lieu les premières festivités des Noirs créoles, reproduisant à leur manière les contredanses européennes de leurs maîtres[29]. Les esclaves domestiques seront un vecteur de la transmission du créole à la main d'oeuvre esclave des de différentes origines ethniques.
Parallèlement, l'autorisation d'implantation par les autorités
cubaines des premiers foyers de tumba francesa[30]
à proximité des centres urbains va rendre le créole plus perméable
avec la langue espagnole. C'est probablement dans cet environnement de
la "sosyété" de tumba francesa, moins isolé que le monde de la
plantation, que naît ce créole, dialecte propre à Cuba.
L'évolution de la langue à l'intérieur des sociétés va dépendre des
membres la fréquentant. Au départ, les autorités contrôlant et
légiférant les activités des cabildos[31]
excluent des sociétés toute autre population que les Noirs créoles
libres. Ils seront malgré tout fréquentés par des esclaves et des
Noirs libres ne provenant pas de Saint-Domingue, avec les risques de
représailles que cela représentait aussi bien pour les persona non
grata que pour l'ensemble du cabildo.
Jusqu'à l'abolition de l'esclavage et les premières guerres
d'indépendance de la fin du XIXe siècle, les sociétés de
tumba francesa connaissent des allers-retours entre tolérance et
coercition de la part du pouvoir colonial en particulier sur leurs
pratiques publiques. Il est vrai qu'elles étaient considérées comme
foyers d'émancipation, de marronnage et d'idées révolutionnaires.
La proximité avec la jeune république d'Haïti -sur le territoire de laquelle l'esclavage avait été aboli dès 1793- et la Jamaïque, où ont lieu des mouvements de révolte, entretient la méfiance, les lois et les arrêtés municipaux coercitifs. Pour les chants de tumba francesa les plus anciens nous étant parvenus[32], l'utilisation d'un créole très pur permet d'occulter leur signification aux locuteurs espagnols, ainsi de faire passer à la société des messages de révolte contre la dureté des conditions de vie et des revendications politiques.
Avec la fin de l'esclavage, les cabildos sont supprimés au profit des sociedades où la mixité ethnique est autorisée[33]. Le cas des cabildos de tumba avant la fin de l'esclavage est une exception, car la mixité y existe depuis leur création. Dans leur cas, être un Noir de Saint-Domingue prévaut sur la race d'origine, tous les membres des sociétés étant des créoles.
Les
sociétés de tumba francesa conservent
une continuité, ne développant que des pratiques culturelles liées aux
« Français ». Après 1886, l'ouverture des sociétés à
d'autres personnes que les descendants des noirs français (bossals
libérés, espagnols) apporte des changements significatifs au créole,
qui se cubanise : ajout d'expressions cubaines,
déformation de la prononciation du créole haïtien, jusqu'à parfois
créer de nouveaux mots.
Peu après, les sociétés de tumba francesa seront pendant les guerres
d'indépendance des foyers de sédition[34].
Leurs chants l'attestent, le créole étant comme dans les
décades précédentes, un moyen de communiquer de manière occulte.
Après
l'indépendance de Cuba, la perméabilité du créole s'accentue,
le besoin d'occulter la signification des chants n'est plus un besoin
relevant de la sécurité de la communauté. Il advient pourtant des
critiques pamphlétaires osées sur la collusion des dirigeants de la
jeune République cubaine avec les Etats-Unis et donc des rapports
difficiles avec l'ayuntamiento[35]
de Santiago. Après la révolution de 1959, certains
chants de tumba francesa à la gloire du castrisme sont quasiment en
espagnol cubain. En effet, il s'agit alors d'être compris par le plus
grand nombre, dans une forme linguistique prônant l'unification.
Deux autres cadres de pratique du créole existeront en parallèle à
celui de la tumba francesa.
- Le premier est celui de la cellule familiale et du
regroupement communautaire. Opportunités de travail et volonté de
retrouver des proches font se regrouper les Noirs en provenance
d'Haïti qui se substituent après l'indépendance cubaine à la main
d'oeuvre esclave. Ils sont tout d'abord logés ensemble dans des
baraquements[36]
sur les plantations, puis également avec la propension à vivre dans
les mêmes quartiers pour les centres urbains. Le créole est donc
pratiqué par les individus tant que durent ces regroupements. Avec le
métissage et l'éclatement progressif de la cellule familiale, le
créole sera de moins en moins parlé au quotidien ou témoigne d'une
forte altérité en comparaison à celui d'Haïti.
- Le deuxième cadre est celui pratique religieuse du vodou. Celle-ci,
importée
de l'île de Saint-Domingue par les Noirs créoles, relève de multiples
branches en fonction des ethnies de chacun. Elle sera l'un des moyens
pour les immigrants de revendiquer leur racines et identité
géographique. A la différence de la tumba francesa, le vodou relèvera
du cadre privé. Après les persécutions dont les vaudouisants auront
été victime à Saint-Domingue, les immigrants créoles sauront cacher
leur pratique religieuse[37].
C'est entre autre pour cela que les liturgies du vodou à Cuba
témoignent d'un créole plus authentique si on le compare avec celui de
la tumba francesa. D'autres parts, ces liturgies sont directement
importées du pays avec les vagues d'immigration successives, il y aura
peu de création en terre cubaine. Il adviendra malgré tout, comme pour
les chants de tumba francesa, que la prononciation tendra de plus en
plus vers l'espagnol cubain, jusqu'à perdre le sens originel du créole
haïtien et de créer de nouveaux mots parfois restant obscur pour le
chanteur lui-même.
Si la langue utilisée dans les chants de tumba francesa était nommée
par certains patuá, il est à noter que le mot est considéré
aujourd'hui par la communauté haïtienne comme discriminant. Il lui
sera donc préféré celui de krèyol [38]ou
créole tout au long de notre étude. Face aux manifestations plus ou
moins larvées de xénophobie, cela dénote de la part de cette
communauté une volonté revendicative de marquer son appartenance à une
culture certes minoritaire, mais de la faire reconnaître par le plus
grand nombre.
Penchons-nous maintenant sur les mécanismes de création des chants de
tumba francesa. Leurs auteurs et compositeurs sont nommés "composé".
Ce terme désigne également l'interprète ou le chanteur soliste
dirigeant le déroulé d'une exécution musicale (dans ce dernier cas il
a cependant coexisté avec le terme plus spécifique de "rey
cantador": roi chanteur). Cependant, la compétence linguistique
du composé se délitera avec le temps, utilisant un créole de
plus en plus mâtiné d'espagnol cubain. Intervient également dans
l'époque moderne la volonté d'être compris hors de sa communauté
locutrice, avec des chants glorifiant la révolution et ses grands
hommes. Dans ce cas, l'utilisation de l'espagnol est massive.
La manière de créer les chants pour le composé connaissait deux chemins possibles. Soit la véritable écriture réfléchie d'une narration au long cours, soit l'improvisation lors de joutes verbales avec d'autres composés. Dans ce dernier cas, les textes sont plus courts, à l'échelle de quelques vers. Nous trouvons cette idée de compétition sur la capacité d'invention sur le vif dans d'autres musiques folkloriques cubaines (coros de clave, contrapunto cubano, rumba, regina du changüi).
La transmission de ce répertoire chanté s'effectue presque uniquement
de manière orale. Certains composés on noté toutes leurs créations ou les chants que d'autres
ont pu leur transmettre, mais souvent les cahiers se perdent ou ne
sont pas transmis aux nouvelles générations. Pour ceux des composés
ayant la capacité d'écrire le créole, ils le font de manière
très phonétique et avec une graphie approchant plus l'espagnol que le
créole haïtien.
C'est en conservant cette notation très proche d'une graphie espagnole
que la majorité des chants seront proposés en préalable tout au long
de cette étude. C'est également de cette manière qu'il nous a été
demandé de transcrire les chants par nos personnes-sources. Pour les
chansons les plus anciennes, le temps et les passages de relais d'un
composé à un autre, a corrompu la pureté du créole d'origine jusqu'à
rendre la signification du texte incompréhensible. Pour appréhender la
signification d'une bonne partie de ceux-ci, il nous a fallu retrouver
une formulation en créole haïtien, avant d'en proposer une version en
français. Certains textes plus récents comprenant beaucoup de
cubanismes (espagnol cubain) auront été laissés dans leur jus et
directement traduits en français.
Les sujets abordés dans les chants de tumba francesa sont très divers.
Au gré de cette étude, nous les avons classés en différentes
catégories. Certains narrent le quotidien de l'époque, la vie des
sociétés, d'autres sont sur l'actualité politique à Cuba ou Haïti,
d'autres encore peignent les hommes face à la puissance de la nature.
Beaucoup des chants les plus anciens appellent à l'émancipation des
immigrés haïtiens (contre l'esclavage, la xénophobie), la révolte
contre les colons espagnols (guerres d'indépendance). Comme dans
d'autres répertoires chantés (conga, carabali), la glorification des
idéaux révolutionnaires et des grands hommes seront aussi source
d'inspiration après 1959.
Concernant
la continuité de création chantée dans la démarche des trois sociétés
de tumba francesa contemporaines, le constat est assez alarmant. Les
dernières créations connues par nous remontent à plusieurs décennies,
par des composé très âgés ou aujourd'hui décédés. Les chants
que produisent les sociétés actuelles sont uniquement des reprises.
Dans une annexe finale nous listerons les composés répertoriés des différentes sociétés, actuelles ou disparues avec leurs caractéristiques (lorsque c'est possible) et des remarques concernant certains patronymes.
Lien
: Annexe sur les composés des différentes
sociétés
D'autre part, le patuà fait de plus en plus figure de langue morte. Même quand ils le comprennent parfaitement, les anciens des sociétés de tumba francesa ne le parlent plus au quotidien et ne le transmettent guère aux jeunes générations. Le risque de rupture linguistique est donc grand. Cela ne veut pas dire pour autant que le créole cubain soit définitivement mort! Certaines communautés haïtiennes sont restées très soudées (La Caridad de Ramón en Oriente, Guamaca près de Camagüey, etc...) et sont parfaitement bilingues. Des organismes développent la langue créole (Kiba Banzil) ou oeuvrent à la préservation patrimoniale et la recherche (Casa del Caribe), d'autres travaillent à la promotion culturelle et événementielle autour des cultures haïtiennes (Festival del Caribe, Bwa Cayman, Festival Eva Gaspar).
Les
caractéristiques formelles des textes de tumba francesa ont
été analysées de la façon suivante par E. Tamames:
-
il n'y a pas de recherche de rime.
-
le changement de créole à espagnol et réciproquement est fréquent et
se fait de façon pragmatique, si on considère que ce changement
« améliore le rythme ».
-
les phrases étant émises en une seule émission d'air, il est facile de
les identifier dans la transcription.
-
les textes ignorent le rythme des syllabes : la principale
attention, « et peut-être l'unique », est l'effet auditif
mis en valeur par la structure rythmique du vers. Tamamés
ajoute : « la musique
n'est qu'un moyen que le composé utilise pour dire ses vers ».
Quant
à l'aspect mélodique des compositions, elles sont toutes dans un
contexte tonal, majeur ou mineur, se différenciant en cela des
mélodies vodou qui évoluent plus sur une modalité pentatonique, comme
d'autres traditions cubaines de racine africaine. Si on différencie
les différents genres de la tumba francesa, la majorité des chants de
mason sont dans des
tonalités majeures[39],
ceux de yuba et de frenté plus en mineur. Il n'est pas rare que la
même mélodie serve à composer plusieurs chants, avec quelques
modifications rythmiques et de hauteur en fonction du nouveau texte.
Les textes et les mélodies sont également modifiés en fonction des
interprètes, que ce soit pour coller à l'actualité de l'époque, ou par
volonté créatrice, sinon par oubli.
Concernant le rôle du choeur, il est anti-phonal et répond au chanteur soliste (composé). Selon la complexité du texte et les volontés du composé, le choeur reprend tout ou partie que celui-ci aura chanté une première fois. Il advient parfois que le choeur reprenne une partie de la mélodie sans le texte, en vocalises ou lalalies. Dans le cas des cantos de puya ou compétitions chantées, les composés s'affrontent chacun en proposant les chansons les plus incitatives à la liesse, ou les plus virtuoses dans l'improvisation. Même si ce type de concours n'est plus pratiqué, il était de même nature que d'autres genres de controverses (regina du changüi, zapateo, columbia,...). Les composé concurrents n'hésitaient pas à interrompre leur adversaire pour prendre la parole avec force gesticulations et en chantant plus fort.
La majeure partie des chants qui suivent ont été collectés auprès de composé à Cuba, ainsi qu'à partir d'enregistrements commercialisés, des documentaires et vidéos disponibles sur internet. Les traductions et les annotations sont des auteurs.
Les chansons comprennent deux ou trois entrées linguistiques : créole
cubain, créole haïtien et français.
- La version en créole cubain se rapproche de l'écriture ou de la
prononciation par nos sources, tout en cherchant une uniformisation de
l'orthographe. Concernant les textes collectés par Tamamés, nous avons
respectés sa graphie.
-
La version en créole haïtien se rapproche à l'écriture contemporaine
du créole en Haïti[40].
- La version en français essaye
d'approcher le sens originel du texte.
Sont
indiquées le cas échéant les interventions du choeur, en italique et
avec un espacement.
Ay
oquendo Maria la O
Compositeur :
inconnu.Transmis par Berta Armiñan Linares, Santiago de Cuba
Chant
de mason
Lien audio Maria La O (Berta Armiñan Linares & Cutumba)
Lien audio Maria La O (Rafael Cisnero Lescay)
Le
chant Maria La O est relié à l'histoire de la fondation des cabildos
de tumbas francesa dans la ville de Santiago.
« Dès
le XIXe siècle, il y avait à Santiago des organisatrices
de comparsa et de formations de percussion (tahonas) à Santiago
de Cuba : que l'on pense à Maria La O & Maria de la Luz,
dirigeantes du Cocoyé de Los Hoyos » (D.
Chatelain "Femmes et percussion à Cuba"
sur www.ritmacuba.com).
Les airs du Cocoyé ont été relevé par
Casamitjana (flûtiste, compositeur et directeur d'orchestre
d'origine catalane, né en 1805 et établi à Santiago de Cuba en 1832,
où il fonda une école de musique et se dédia à la direction
d'orchestre et la composition), ceci en 1836 et un de ceux-ci, Maria
La O, orchestré dans le pot-pourri cubano de Laureano Fuentes
Matons, élève de Casamitjana, en 1847). La musicologue Zoila Lapique
relève : « Quelque chose de semblable à ce phénomène
contemporain de la conga santiaguera se passa en 1852
quand vint à La Havane la comparsa del Cocoyé avec ses
deux dirigeantes, les mûlatresses María de la O Soguendo y María de
la Luz, jointes au nommé Manuel qui dansait avec l'Anaquillé,
marionnette de carnaval. » (ibid.)
Le compositeur havanais Lecuona donna ensuite le titre de Maria La O à une zarzuela. Son ami Edwin Tolón, impresario de
théâtre raconte ainsi comment Casamitjana entendit les airs du
Cocoyé, en reprenant des chroniques de Santiago de Cuba : « il
était appuyé sur la rambarde de la fenêtre de la maison où il
vivait, quand il vit venir une comparsa composée d'un grand nombre
de personnes dirigées par deux mulâtresse fastueuses, une était
Maria La O et l'autre Maria de La Luz, qui chantaient et dansaient
une musique électrisante. Impressionné par leur danse, le
compositeur rejoint le piano et rejoua de mémoire les mesures de
cette musique anonyme, puis les fit passer au papier à
musique » (Tolón 1961).
El Cocoyé fut ensuite le nom porté par une importante tumba francesa de Santiago, située dans l'actuel Paseo Marti, dans un local jouxtant l'actuel Foco de la Conga de Los Hoyos et survécut jusqu'au milieu du XXe siècle (l'emplacement est aujourd'hui une station-service). Des liens historiques unissent les deux sociétés Lafayette et El Cocoyé.
La
comparsa de Maria La O et Maria
de La Luz était une version urbaine de la tahona, défilé pratiqué par
une population de même origine que les membres des sociétés de tumba
francesa. Depuis plusieurs décennies, la société Lafayette s'emploie à
préserver dans son local et
pour les traditions de carnaval les traditions de la tahona, incluant
une danse de tressage de rubans autour d'un mât reprise par
différentes troupes folkloriques.
Le
chant Maria La O, faisant référence à un point d'origine des tumba
francesas urbaines (si on les oppose aux danses des tumbas francesas
des plantations) fait toujours partie du patrimoine de la société
Lafayette.
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Ay oquendo[41]
|
Ay
okenn dout |
Ah,
aucun doute |
Sous
haute surveillance, enterrement d'Evaristo Estenoz en 1912,
fondateur du parti de "Rassemblement
des Indépendants de Couleur" et meneur insurgé.
Le chant suivant parle de la fin "des
affaires de race" à Cuba. Même si en 1868 un décret de la
cour espagnole interdit la traite négrière, l'abolition définitive
de l'esclavage prendra du temps à Cuba.
En
1868, Carlos Manuel De Céspedes annonce l'émancipation de ses esclaves
et lance le soulèvement contre le pouvoir espagnol, déclenchant la
"guerre des dix ans" (à cette occasion les esclaves libérés dansèrent
« français » dans la plantation de Céspedes, dans l'actuelle
province de Granma)[42].
Il faudra attendre 1880 pour qu'une loi déclare l'abolition de
l'esclavage à Cuba, celle-ci ne commencera à être appliquée que six
ans plus tard. Le traffic négrier continuera illégalement jusqu'à
l'orée du XXe siècle. En 1893, l'égalité des droits entre
blancs et gens de couleurs[43] est proclamée. Cela donnera
rapidement à des bouleversements politiques avec la création en 1908
du parti de "Rassemblement des Indépendants de Couleur".
A
quel évènement précis la chanson suivante fait allusion, nous ne le
saurons pas vraiment, mais son thème témoigne en tout cas de son
ancienneté.
We aye o
(Vois-tu, le passé)
Compositeur :
inconnu. Transmis par Andrea Quiala Venet, société La Caridad de
Oriente, Santiago de Cuba.
Chant de mason
Lien audio We aye o 1 (Andrea)
Lien audio We aye o 2 (La
Caridad de Oriente)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
We
aye o |
Wè
ayè o |
Voyez-vous,
du passé |
Le
chant qui suit est très ancien et daterait de l'époque de l'esclavage.
L'ethnologue Laura Cruz Rios le recueille auprès de Trinidad Lamot
Robles à Sagua la Grande dans la province d'Holguín (cf. Revue
Oralidad N°13). Trinidad était l'une des doyennes et principales
chanteuses de la société de Bejuco au début des années 2000. Le texte
est clair et liminaire : on parle ici d'une personne de couleur qui se
meurt par l'accumulation des sévices et châtiments dont elle est
victime. A l'orée de la guerre d'indépendance, sa grand-mère, Ma Piyá
s'était enfuie avec ses enfants de la ferme du français Robles, pour
être ensuite rattrapée, battue puis vendue par celui-ci à Eugenio
Revé, de la ferme La Dolorita. C'est dans cette propriété qu'elle
s'initiera à la tumba francesa. Les fêtes y avaient lieu pour la
plupart sans l'autorisation du maître. En compagnie de Felipe Revé
ainsi que d'autres esclaves marrons, elle s'en s'échappera et se
réfugiera dans les dans les montagnes entre Sagua la Grande et
Guantanamo, où une fois installés ils créeront le village de Bejuco et
la tumba francesa.
Mamá ju mue mori (Maman, mon heure est venue)
Transmis par Trinidad Lamot Robles, tumba francesa de Bejuco.
(graphie
et traduction précisées par nous)
Créole cubain | Créole haïtien | Français |
Mamá
ju mue mori U pa bisuen crie pa mue Tu bien conet Si Bondie pa touye mue Cretien ye va jeme mue Mamá m'pa ye o M'ap tuye mue |
Manman
jou mwen mouri Ou pa bezwen krye pa mwen Tou bien konèt Si Bondye pa touye mwen Kretyen ye va jeme mwen Manman m'pa ye o M'ap touye mwen |
Maman,
ma fin est proche Inutile de pleurer Tu le sais bien Si le Bondieu ne me tue pas Un chrétien le fera Maman, je ne suis plus Je meurs |
La
révolte
gronde. Le lien invoqué, le filleul, semble plus symboliser la
solidarité qu'un lien familial. Si l'on se réfère à l'entretien de
Laura Cruz avec Trinidad Lamot Robles (revue Oralidad N°13), La
tumba francesa de Bejuco fût fondée par des esclaves marrons dont un
grand nombre intégreront les troupes de mambises et porteront la
guerre contre les espagnols jusqu'aux premiers jours de la
République.
E Fillol mue (Eh, mon filleul)
Compositeur : inconnu.Transmis
par Victoria Robles Videau, tumba
francesa de Bejuco
Chant de mason
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
E
fillol[45] mue |
E
fiyòl
mwen |
Ah,
mon filleul |
Cette
deuxième version du même chant diffère sur quelques mots. Des
homophonies permettent de l'écrire et d'aussi le comprendre ainsi. Dans
ce
cas, le sens perd dans le côté historique de la révolte. Il se
transforme en histoire de méfiance en face de la bonne fortune
inexplicable d'un membre de la communauté.
E
fillol mue |
E
fiyòl
mwen |
Ah,
mon filleul |
Caféière en Oriente, photo non datée, XIXe siècle. Au premier plan les séchoirs à café.
Un
fugitif de la lutte clandestine se cache la nuit et peut être pris à
la lumière de la lune. Le texte peut être resitué dans la guerre
d'indépendance ou dans la guérilla révolutionnaire.
La
lina menguanto (La
lune décroissante)
Compositeur : inconnu.Transmis par Maria Luisa Barrientos
Garbey, Conjunto Folklorico de Oriente
Chant de frenté
Lien audio La lina menguanto (Maria Luisa Barrientos Garbey)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
La lina menguanto[48] |
Lalin
a menm kònt o |
Ô
même la lune est contre moi |
Préparation d'un camp de rebelles, 1899 © J. Gomez de la Carrera.
Ce chant critique une imprudence dans la
clandestinité (qui peut être celle de cimarrones, d'indépendantiste,
ou guérilla révolutionnaire) et avertit du danger de rester regroupé
dans un lieu repérable au lieu de se fondre dans la nature. En
utilisant l'image "la nature
de la chèvre est de rejoindre la montagne".
La
cabra siempre tira pa'l monte
(La chèvre toujours revient dans la montagne)
Compositeur : inconnu.Transmis par Rafael Cisnero Lescay,
chanteur de Cutumba
Chant de frenté
Lien audio La cabra siempre tira
pa'l monte (Rafael
Cisnero Lescay)
Créole
cubain |
Français |
U pral venao camino la cae |
Vous
allez quand même à vingt à la maison[50] |
Nous
sommes
ici au sortir de la guerre d'indépendance (1898). Sont énumérés les
héros de la libération (Antonio Maceo, José Quintín Banderas,
Guillermón Moncada, José Martí). Même si Cuba vient de gagner son
indépendance, beaucoup de morts sont à déplorer.
Oigan como lloran los niños (Ecoutez
comment pleurent les enfants)
Compositeur : chanteur de la société San Juan Nepomuceno, repris et
adapté par Pelayo Terry (Guantanamo).
Ecrit dans les années '30.
Collectage : Elisa Tamames (1955. Cf. Bibliographie)
Chant de yuba
Castillan
et créole cubain |
Français |
Caballero,
oigan como lloran los niños |
Messieurs,
entendez comment pleurent nos enfants |
Guerillero del monte
(Guerrier
de la montagne)
Compositeur : inconnu.Transmis par Rafael Cisnero Lescay,
chanteur de Cutumba
Chant de mason
Lien audio Guerrillero del monte (Rafael Cisnero Lescay)
Lien audio Guerrillero del monte 2 (Cutumba)
Ce
chant fait référence à la fin de la guerre d'indépendance contre
l'Espagne (1898) et des maquis organisés par les mambises (soldats
des forces révolutionnaires; ce terme est plus fréquemment employé que
celui de guerillero pour désigner
les révolutionnaires de ce conflit).
Parmi les mambises connus pour leur amitiés dans les tumba francesa,
les géneraux Quintín Banderas, Guillermón Moncada, et Antonio Maceo
étaient membres de la société La Caridad de Oriente (témoignage de
Gaudiosa Venet Danger, "Yoya", ancienne reine de la Caridad, in
"Testimonios de una misma expresión cultural cubana, la tumba
francesa", Revue Oralidad N°13).
Si
l'expression "quita
te
tu pa' ponerme yo" (pousses-toi
donc que je m'y mette)
a
été employée pour moquer le jeu des politiciens prenant la place les
uns aux autres (cf. note ci-dessous), elle prend ici un sens
révolutionnaire, les mambis ou maquisards prenant la relève de l'ordre
ancien.
La
reprise
actuelle du chant peut lui donner un sens contemporain. N'oublions
pas non plus que la guerilla castriste s'est installée précisément
dans la Sierra Maestra, une zone autrefois quadrillée par les
plantations de café d'où sont originaires les membres urbains de la
tumba francesa de Santiago.
Espagnol
(Cuba) |
Français |
Guerillero del monte |
Guerrier
de la montagne |
Quitate tu pa' ponerme yo
est une expression utilisée en Espagne en 1935 pour railler "la valse"
et l'inefficacité des hommes politiques à la tête du pays. Elle est
aussi le titre d'une pièce de théâtre cubaine de 1933, Quítate tú
para ponerme yo. Celle-ci est une satire sur les derniers
présidents (José Miguel Gomez, Zayas, Menocal, Grau) dont les auteurs
raillent entre autres, leur soumission aux Etats-Unis. Cette pièce ne
fût représentée qu'une fois, interdite suite aux échaufourrées qu'elle
déclencha. Cette expression est reprise en 1971 comme titre d'une
chanson de Johnny Pacheco et Bobby Valentín. Ce titre sera l'un des
succès de la Fania All Stars, en particulier lors du concert mythique
au club Cheetah de New York.
Troupe espagnole à Cuba, 1896. DR.
Une
variation sur le thème du guerrier. La concision du texte ne nous
permet pas de préciser les circonstances de l'action. Est à
supposer la brusquerie du dit personnage.
El guerrillero e (Ce guerrier a l'air)
Compositeur : inconnu. Transmis par Orlando Aramis Brugal
Suarez de Babul
chant de mason
Lien audio El guerrillero e (Orlando Aramis)
Créole
cubain |
Français |
El
guerrillero e |
Ce
guerrier est |
Un membre du "Rassemblement des Indépendants de Couleur" demande réparations au pouvoir républicain, suite au massacre de 1912. Gravure de presse © Pío.
Un fragment de texte évoquant les
membres d'une société plongés dans le désarroi, privés de leur
activité de musiques et de danses. Elisa Tamames ayant travaillé
directement avec Pelayo Terry, nous transmet les raisons de ce
désarroi : l'auteur a voulu transmettre l'état d'incertitude
et d'insécurité
qui
régnait en 1912 dans le pays[54].
Le soulèvement du parti
des Indépendants de Couleur en Oriente provoqua une
répression sanglante, avec des milliers de morts. Furent
particulièrement touchés villes et villages qui avaient des
plantations de café et une activité de tumba francesa : El
Cobre, El Caney, San Luis et des localité autour de Guantanamo.
Les sociétés locales comptaient bon nombre d'activistes et
soutien aux Indépendants de Couleur. On sait par
ailleurs que cette répression fait partie de la mémoire
collective dans la société de tumba francesa de Guantanamo, pour
ne parler que d'elle. Leonor Terry Dupuy, reine d'honneur en
parle dans un récit de vie : plusieurs de ses parents,
probables membres du parti des Indépendants de Couleur furent
massacrés en 1912, année de sa naissance : « en la
primera guerra que hubo aquí, en Cuba, mataron a mi papá y mis
tías. Como vivían aquí, en Guantánamo, fueron al campo donde
vivimos nosotros y trajo a mi mamá, que estaba en estado de
mí, porque yo no conocí a mi papá. » (dans la
première guerre qu'il y a eu ici à Cuba, mon père et mes tantes
ont été tuées. Comme ils vivaient ici, à Guantanamo, ils vinrent
dans la campagne où nous vivions et fit venir ma maman, parce
que je n'ai pas connu mon papa.)[55]
Ki sa a na fe (Que pouvons-nous faire ?).
Compositeur
: Pelayo Terry[56].
Société La Pompadour, Guantanamo. Collecté auprès d'Emiliano
Castillo Guzman
Chant de mason
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Ay
pueblo ki sa a na fe |
Ay
pueblo[57]
ki sa n'ap fè |
Hé
mon peuple, que pouvons-nous faire ? |
Ce chant interpelle le président de la République José Miguel Gomez,
complice pour avoir laissé faire (sinon organisé) l'assassinat des deux
leaders de l'insurrection du Parti Indépendant de Couleur, Noirs et
vétérans de la guerre d'indépendance (Estenoz avait combattu au côté du
général Moncada et d'Ivonet au côté du libérateur Maceo). Alors que les
autorités de la ville ordonnaient la chasse à l'homme, il célèbre le
courage des insurgés floués par la République. Dans le cas d'Evaristo
Estenoz, relate E. Tamamés, il a en effet été abattu dans le dos après
s'être livré aux autorités. Pedro Ivonet comme Evaristo Estenoz sont
assassinés le 27 juin 1912.
José
Miguel
Compositeur
: Lestapí.
Texte issu de la thèse d'Elisa Tamamés
Chant de yuba
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
José
Miguel leve la gué |
José
Miguel leve lage |
José
Miguel tu te dresses |
Une
variante sur le même sujet que la chanson précédente.
Bondie José Miguel (Bondieu
José Miguel !)
Compositeur : Pelayo Terry.
Chant de yuba
Lien audio Bondie
Jose Miguel (Rafael Cisnero Lescay & Cutumba)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Bondie
José Miguel M'ap
jele Pedro Ivonet |
Bondye
José Miguel M'ap
jele Pedro Ivonet |
Bondieu José Miguel Je pleure Pedro Ivonnet Je pleure Evaristo Estenoz Bondieu de Bondieu! De notre triste sort ils nous ont libérés Quelle liberté! |
Photo : chevauchée d'une troupe de mambis (insurgés) cubains.
Un
texte à la gloire des vétérans de la guerre d'indépendance, mais aussi
une critique amère sur la jeune République, les espoirs bafoués. Bon
nombre des combattants dans les troupes mambí étaient des anciens
esclaves libérés ou marrons. Ils nourrissaient l'idée d'une plus
grande liberté et d'opportunités de travail au sortir de la guerre.
Hélas! le racisme ne favorisait pas ces gens de faible condition.
Ay,
viva los Cubanos! (Hourra,
vive les cubains )
Compositeur : Pelayo Terry, société
La
Pompadour, Guantanamo. Ecrit dans les premières années de la
République (circa 1902)
Collectage : Elisa Tamames (1955. Cf. Bibliographie)
Chant de yuba
Créole
cubain et espagnol (Cuba) |
Créole
haïtien |
Français |
Ay,
viva los Cubanos |
Ay,
tan viv Kiben yo |
Hourra,
vive les Cubains! |
*
Dérivé
créole de acabar
(terminer)
**
Tamamés traduit dans son lexique : bénéfice. Grennen en
créole haïtien signifie reproduire, donner beaucoup d'enfants
***A
noter
que l'auteur ne réutilise pas grenesi, mais préfère le
castillan pour cette deuxième occurrence
****
Sous-entendu: ils ne savaient ni lire ni écrire.
Un
soldat
accusé d'abandon de poste, au risque de sanction de la part de son
supérieur.
Silencio (Silence)
Compositeur
: inconnu.Transmis
par Elivania Lamot Lara, société de Bejuco
Chant de yuba
Lien audio Silencio (Elivania Lamot Lara)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Coronel
ou cone mue, Licia |
Koronel
ou konnen mwen, Licia |
Colonel,
vous me connaissez, Licia |
Soldats de la guerre d'indépendance cubaine.
Payer
les
taxes et impôts à la couronne royale n'était visiblement pas du goût
de tous les habitants de l'île de Cuba, territoire espagnol. C'était
l'objet de fanfaronades, voir de soulèvement face à ce pouvoir
lointain, bientôt considéré comme usurpé.
Mue mande decir mue pe (Vous me demandez si j'ai
peur)
Compositeur : inconnu.Transmis
par
Elivania Lamot Lara, société de Bejuco
Chant de yuba
Lien audio Mue mande decir mue pe (Elivania Lamot Lara)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Mue
mande
decir mue pe |
Mwen
mande di si mwen pè |
Vous
me demandez si j'ai peur |
Gravure sur la guerilla des mambis.
La
guerre et ses ravages, non sans emphase ni licence poétique.
Laren Olay[61]
(La reine Olay)
Compositeur
: inconnu.Transmis
par Elivania Lamot Lara, société de Bejuco
Chant de yuba
Lien audio Laren Olay (Tumba francesa de Bejuco)
Lien audio Laren Olay (Elivania Lamot Lara)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Laren
Olay la priye |
Larènn
Olay ap priye |
La
reine Olay[62]
prie |
Berta Armiñán Linares, 2011 © Miguel Ángel Gaínza Chacón.
Un
chant qui marque la fin de la guerre d'indépendance et le retour à
la paix. Mais tout est loin d'être réglé « Beaucoup de tués
pour l'égalité » : mettre à bas la colonie aurait coûté la
vie à un homme valide sur six.
Mesa mi lo fe con tan[63]
(Mes amis l'ordre me rend heureux)
Compositeur : Pablo Valier.
Transmis par Berta Armiñan Linares
Chant de yuba
Lien audio Mesami lo fe con tan (Cutumba & Berta Armiñan
Linares)
Lien audio Mesami lo fe con tan
(Rafael Cisnero Lescay)
Lien audio Mesami lo fe con tan
(Inconnu)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Mesa
mi lo fe con tan |
Mezanmi
lòd fè'm kontan |
Mes
amis l'ordre me rend heureux |
Esclaves fugitifs à Cuba, gravure fin XIXes., auteur inconnu.
On
peut voir dans ce chant un parallèle entre la lutte
anti-impérialiste et indépendantiste d'un côté et l'affranchissement
de l'esclave qui ne veut plus « être attaché ».
We kongo wa coje la dos (Regardez congos comment nous avons
courus)
Compositeur : inconnu. Transmis par Rafael Cisnero Lescay de
Cutumba
Chant de yuba
Lien audio We kongo wa (Rafael Cisnero Lescay)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Wè
kongo wa |
Wè
kongo nou a |
Regardez
congos[70] |
Ce premier chant clame la fierté et l'optimisme face aux possibles adversités. La crainte exprimée peut être reliée aux interdictions de rassemblement dont pouvaient être victimes les sociétés, de la part des autorités coloniales au XIXe siècle. Nous avons trouvé peu de témoignages tangibles sur les premiers rassemblements festifs des "fransé", à l'époque où ils n'étaient pas encore constitués en "sociétés". Pour autant, on sait que les réunions esclaves autorisées dans le cadre de la plantation étaient réglementés à l'échelle du pouvoir politique local. Le ban de police de Santiago les autorise jusqu'à 20h et principalement les dimanches (cf. A. Renault, p. 360-61). En 1817, le propriétaire d'une plantation de Santiago et les participants à une fête créole non autorisée sont condamnés à de lourdes peines, de l'amende aux travaux forcés, ou à l'expulsion (Cf. "Una tempranía cofradía vodú en Santiago de Cuba", Olga Portuondo Zuñiga, Del Caribe N°55, 2011).
Jusqu'à
1880 et la loi d'abolition des cabildos de nation, les
sociétés de tumba francesa ne sont pas reconnues par les autorités,
même si en figurent certaines auparavant sur les registres
épiscopaux[73].
Ces interdictions de rassemblement des sociétés de tumba francesa
existèrent aussi dans la jeune République, de même que pour les
comparsa carabali à Santiago de Cuba[74].
La presse locale justifie les interdictions de défiler par les
troubles et échauffourrées que provoquaient les sorties de ces
sociétés[75].
Novedad, no hay novedad (Des
nouvelles, il n'y a pas de nouvelles)
Compositeur : inconnu. Transmis
par Andrea Quiala Venet, société La Caridad de Oriente, Santiago de
Cuba
Chant de mason
Lien audio Novedad, no hay novedad (Cutumba)
Lien audio Novedad, no hay novedad (La Caridad de Oriente)
Espagnol
(Cuba) |
Français |
Novedad,
no hay novedad (Coro) Trabajadores
no hay novedad |
Des
nouvelles, il n'y a pas de nouvelles[76] (Choeur) Travailleurs,
il n'y a pas de nouvelles |
Un
chant auto-descriptif d'une fête de tumba, l'entrée successive du catá
appelant les tambours, premier puis boula, procurant le rassemblement
du voisinage jusqu'à l'organisation de la danse.
De
la
tumba (De
la tumba)
Compositeur : Celestino Borrero (1898- ?), société La
Pompadour, Guantanamo.
Collectage: Olga Fernández Valdés, en 1979 (cf. bibliogaphie)
Genre non identifié
Espagnol
(Cuba) |
Français |
De
la tumba |
De la tumba |
Societe Florindo
Compositeur :
inconnu.Transmis
par Rafael Cisnero Lescay, Cutumba
Chant d'introduction avant un mason
Lien audio Societe
Florindo (Maria Luisa Barrientos Garbey)
Lien audio Societe Florindo (Rafael Cisnero Lescay)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Societe Florindo[77],
Ay! |
Sosyete
Florindo ay! |
Société
Florindo, eh! |
Sito
dice[80] ("Sitôt
dit" ou "Sixto dit")
Compositeur : Ibrahim Baqué Sagarra
Chant de mason
Le chant « Sito dice » témoigne de la plasticité de la
tradition orale. En voici une version attribuée
à Ibrahim Baqué Sagarra, composé de La Pompadour où le protagoniste
objet d'une satire est nommé sous le nom de Sixto :
Sixto Reyes
Que li vle fe composé
Sixto Reyes
Que li vle fe composé
Sixto penye tet ou
Y vini chante apre
Sixto netoye soulye ou
Y vini chante apre
La
version suivante, que tout indique être l'originale, est parfaitement
logique, toujours connue localement.
Mais ce chant circule aussi à Santiago de Cuba, transmis par
différente personnes liées à la tradition de tumba francesa (La
Caridad) ou appartenant à des troupes folkloriques (Folklorico de
Oriente, Cutumba) selon la version enregistrée transcrite ci-dessous.
La lignée maternelle de l'interprète de l'enregistrement appartenait à
la tumba disparue El Cocoyé et a par ailleurs longtemps appartenu au
Ballet Folklorico d'Oriente.
Lien audio Sito dice (Nancy Garcia Vinent & Galibata)
Lien audio Sito dice (Rafael Cisnero Lescay)
Espagnol
(Cuba) |
Français |
Dice sito[81]
que quiere ser composé |
Sitôt
dit qu'il voudrait devenir composé[82]
|
Le
composé est un personage central des tumbas francesas, il ou elle
écrit les textes conformément aux codes de la tradition et les
chantent en soliste. Autrefois il fallait improviser lors des
controverses. On ne s'improvise pas composé, il faut avoir fait ses
preuves et passer des étapes. Il faut aussi avoir la prestance et le
paraître d'un personnage central de la fête. Une fois que le
personnage aura obtenu l'apparence digne de la fonction centrale de
composé, il pourra venir danser ('bailar" dans la
version de Santiago) ou chanter ("cantar" dans la version de
Guantanamo) le dernier cas étant
conforme à la fonction de chanteur soliste -outre
d'auteur/compositeur- du composé. Peut-être le sens de la
version de Santiago est que même ainsi ce ne sera toujours pas
suffisant pour prétendre à être composé!
Bel vasay mue
(Mes fidèles vassaux)
Compositrice : Ernestina
Lamot Vegué, société La Pompadour, Guantánamo.
Chant de mason
Introduction
de
soirée, chant de bienvenue.
Lien audio Bel vasay
mue (Amado Gonzales Duruthy & La Pompadour)
Le
texte
suivant met en résonnance la qualité vestimentaire nécessaire aux
danses de figure de la tumba francesa et la promenade où on se
montre à son avantage avec un souci d'élégance et de bonne
apparence, comme en témoigne le détail aujourd'hui bien désuet de la
montre à gousset. Il commence par des civilités où il n'est pas
indifférent d'employer des mots français, signe de bonne éducation.
On retrouve ce thème de la bienséance plus loin dans un autre chant
de bienvenue : Mue rive yo di la
et son "bonsoir".
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Mesa mi |
Mes
zanmis |
Mes
amis |
Sur
la
même mélodie que le texte précédent, le composé nous conte ici son
envie de voyager. Il est fréquent que la même mélodie serve à
plusieurs textes, surtout s'il s'agit d'inventer sur le moment.
L'usage de l'espagnol renforce l'idée que le composé puise dans une
série de phrases préparées dont il définit l'ordre au dernier
moment. Cet exercice proche de l'improvisation nécessite une
parfaite connaissance de la langue, il sera plus aisé de le réaliser
dans la langue la plus usuelle.
Compositeur :
Juan
Gualberto Vichi Gibert « Bebé » (né en 1918), société
La Pompadour, Guantanamo
Chant de mason
Castillan |
Français |
Bien
temprano mañana yo me
voy |
De
bonne heure demain je m'en vais |
Mesami
o ay fet pe cumanse[88]
(Le spectacle peut commencer)
Compositrice
: Ernestina Lamot Vegué, société La Pompadour, Guantanamo.
Chant
de mason
Lien audio Mesami o ay fet pe cumance (Amado Gonzales Duruthy
& La Pompadour)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Mesa
mi o ay fet pe cumanse |
Mes
zanmis o ay fèt pe kòmanse |
Ô
mes amis, ah, la fête peut commencer |
Ponpadou (Pompadour)
Compositeur
: Emiliano
Castillo
Guzmán (Chichi). Société La Pompadour, Guantanamo
Lien audio Ponpadou (Emiliano Castillo Guzman)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Tumba France Ponpadou |
Tumba France Ponpadou |
Tumba Francesa Pompadour |
Le texte suivant dicte les règles de bienséance en société, où l'incompréhension de la langue ne doit pas être un frein à la politesse.
Mue rive yo di la (Il m'arrive de dire)
Compositeur : Luis Garzón[90].
Transmis par Andrea Quiala Venet, société La Caridad de Oriente,
Santiago de Cuba
Chant de mason
Lien audio Mue rive yo di la (Andrea Quiala Venet)
Lien
audio Mue rive yo di la
(Andrea Quiala Venet & La Caridad)
Créole
cubain |
Créole haïtien |
Français |
Mue
rive yo di la |
Mwen rive yo di la |
Il m'arrive de dire |
Dans
la
même veine que le chant précédent, où les salutations -expression
d'une valeur des sociétés de tumba francesa : la civilité-
sont la base des bonnes relations.
Buenos dias como estas? (Bonjour
comment allez-vous?)
Transmis par Orlando Aramis Brugal Suarez, Conjunto Folklorico
Babúl, Guantanamo
Chant de mason
Lien audio Buenos dias como estas? (Orlando Aramis)
Espagnol
(Cuba) |
Français |
Ay
compañeros |
Hé,mes
amis |
La
mélodie de la chanson suivante est un patron qui est souvent utilisé
par les composé pour leurs créations[92].
Le sujet ici est la fête de changüi, l'un des genres musicaux
les plus populaires à Guantanamo. La connivence entre le composé
et les joueurs de changüi s'explique également par des relations de
voisinages. En effet, la Casa del Changüi se situe en face du
foyer de La Caridad.
Compañeros cuando yo sale de aqui (Compagnon
quand je sortirais d'ici)
Compositeur : inconnu. Societe La Pompadour, Guantanamo
Chant de mason
Lien audio Compañeros
cuando yo sale de aqui (Société
La Pompadour)
Espagnol
(Cuba) |
Français |
Compañeros
cuando yo sale de aqui |
Mes
amis quand je sortirai d'ici |
Préparation à la danse du frente, Bejuco 2013 © Aracelys Aviles Suarez.
Les
fêtes de la tumba francesa cherchent la precision chorégraphique et il
est y est de la première importance de faire les bon choix de style
(mason, yuba, frenté) au moment adéquat. Et le fait d'être à Bejuco en
pleine campagne n'y change rien!
Vye mama lape mande yuba (L'ancienne
nous demande un yuba)
Compositeur : Dioniso
Lamot Robles[93].
Transmis par Elivania Lamot Lara, société de Bejuco
Chant de yuba
Lien audio Vye mama lape mande yuba (Elivania Lamot Robles)
Lien audio Vye mama
lape mande yuba 2 (Tumba francesa de Bejuco)
Patois
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Vye mamá[94]
la pe mande yuba |
Vièj
manman nap' e mande youba |
L'ancienne
nous demande un yuba |
La
Pompadour © Céline Malarange / Ritmacuba.
On
entre ici plus précisément dans le respect des codes et les exigences
de présentation demandées aux aux participants des danses de figure
avec leur dimension théâtrale, selon le rang et le rôle dévolu. Sous
réserve de recherches ultérieures, on peut présumer d'une ancienneté
particulière de ce chant.
Pu
entre
dan sosiete (Pour
rentrer dans la société)
Auteur & compositeur
inconnus, société de Bejuco
Chant de mason
Lien audio Pu entre dan sosiete (Tumba francesa de Bejuco)
Lien audio Pu entre
dan sosiete 2 (Tumba francesa de Bejuco)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Pu
entre dan sosiete |
Pou
antre dan sosyete |
Pour
rentrer dans la société[98] |
Elivania Lamot Lara (au centre) et les choristes de Bejuco en préparation vestimentaire pour la fête de tumba francesa © 2013 Aracelys Aviles.
Les
traditions doivent être respectées au sein de la société de tumba
francesa. Toute innovation peut être vu comme un relâchement ou faute
de goût.
Mue mande yo kouman a fe sa e (Je
demande, comment font-ils cela?)
Transmis par Elivania Lamot
Lara, société de Bejuco
Chant de yuba
Lien audio Mue mande yo kouman (Elivania Lamot Lara)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Mue
mande yo cuman na fe sae |
Mwen
mande yo kouman nan fe sa e |
Je
me demande, comment cela est-ce possible ? |
Paraître à son avantage peut mener tout
droit au chant de séduction où le séducteur ne se prive pas de jouer
malicieusement avec les mots.
Maria
Luisa[100]
Compositeur
: inconnu. Transmis par Rafael Cisnero Lescay & Cutumba
Chant
de mason
Lien audio Maria
Luisa (Rafael Cisnero Lescay)
Lien audio Maria Luisa (Cutumba)
Espagnol
(Cuba) |
Français |
Ay
Maria Luisa pone en hora tu reloj |
Eh,
Marie Louise, mets donc ta montre à l'heure |
Emiliano
Castillo
Guzman
"Chichi",
années '90.
DR.
Ce
chant témoigne des actuels évènements où les trois sociétés de tumba
francesa[101]
se réunissent pour faire la fête.
Gran Anivese
(Le grand anniversaire)
Compositeur & auteur : Emiliano Castillo Guzmán, société La
Pompadour, Guantánamo
Pas de
lien audio
Créole
cubain |
Créole haïtien |
Français |
Anne sa a Nan
Ponpadou |
Ane sa la Nan Ponpadou |
Cette
année Dans
la Pompadour |
Andrea Quiala Venet après une représentation de tumba francesa, 2012 © Daniel Chatelain/Ritmacuba.
Dans
cette chanson, Andrea Quiala Venet, la compositrice, nous raconte
ses souvenirs familiaux. Elle cite des noms associés
à d'anciennes exploitations caféicoles. Nous voyons ici que la tumba
francesa a été un genre indissociable de la route du café, une
manifestation culturelle pas uniquement implantée à proximité des
zones urbaines.
Il existait dans ces fêtes une véritable compétition entre les
chanteurs solistes, tel que dans les controversias campesinas. Le
texte suivant nous indique également des bribes d'un autre élément:
le caractère véhiculaire de certains chants, servant à agrémenter le
trajet pédestre du cortège se rendant à une fête de tumba francesa.
Salimos
desde Palmar
Compositrice :
Andrea Quiala Venet, société La Caridad de Oriente. Transmis par
Andrea Quiala Venet
Chant de mason
Lien audio Salimos desde Palmar (Andrea Quiala Venet)
Espagnol (Cuba) |
Français |
Salimos
desde Palmar[103] |
Nous
sortions depuis Palmar |
Les
trois sociétés de tumba francesa actuelles se réunissent de manière
plus ou mois régulière, au gré de rencontres provoquées pour un
festival, une étude ethnographique, la réalisation d'un
documentaire. Ce sont, au dire de leurs membres, des moments très
appréciés
qui marquent l'ensemble des participants. Ces rencontres donnent
parfois l'occasion de créer des chansons pour la circonstance.
Sosyete
La Caridad
Compositrice :
Andrea Quiala Venet, société La Caridad de Oriente. Transmis par
Andrea Quiala Venet
Chant de mason
Lien audio Sosyete La Caridad (Andrea Quiala Venet)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Societe
La Caridad |
Sosyete
La Caridad |
Société
La Caridad |
Société
La Pompadour. de gauche à droite: Freddy Martínez Brooks, Leonor
Terry Dupuis, Ofelia Jarrosay, années 2000. DR.
Le
chant
suivant est une variante sur le précédent.
Guantanamo
el mana
Compositeur :
inconnu.
Chant de mason
Lien audio Guantanamo el mana (Andrea Quiala Venet & La
Caridad de Oriente)
Créole
cubain |
Créole haïtien |
Français |
Societe
Guantánamo |
Sosyete
Guantanamo |
Société
de Guantanamo
|
Si
on suivait l'avis de la famille Venet Danger, ce chant étant de
tahona et non de tumba francesa, ne devrait pas figurer ici. En même
temps cette famille a fait un travail de récupération de la
tradition de la tahona et présente celle-ci dans son local, avec
entre autres la danse de la cinta. Bien sûr cette
récupération ne doit rien au hasard, les danses de salons de la
tumba francesa et les déambulations de tahona provenant de la même
communauté, avec les mêmes caractéristiques linguistiques. Il n'y a
ni tahona ni cinta dans les tumbas francesa de Guantanamo &
Bejuco.
Adios
mis amigos (Adieu
mes amis)
Compositeur
:
José Rufino Venet.
Chant de tahona
Lien audio Adios mis amigos (Andrea Quiala Venet & La
Caridad de Oriente)
Espagnol
(Cuba) |
Français |
Adios
mis amigos |
Adieu
mes amis |
Danse
de la Cinta, La Caridad, Santiago de Cuba © René Silveira.
Là où il est encore question de la danse de la cinta, originaire des groupes itinérant de tahona. La Caridad l'a intégré à son répertoire, en évitant par cela la disparition du genre. L'auteure préfère le castillan au créole pour que la chanson soit entendue par le plus grand nombre.
Ven
mi morena
Compositrice :
Andrea
Quiala Venet , société La
Caridad de Oriente. Transmis par Andrea
Quiala Venet
Chant de tahona
Lien audio
Ven mi morena 1 Andrea
Quiala Venet solo (documentaire d'Olaf Geisler 2016)
Lien audio Ven mi morena 2
Andrea Quiala Venet avec La Caridad de Oriente (2006)
Espagnol (Cuba) |
Français |
Ven
mi morena nos vamos a bailar |
Viens
ma métisse nous allons danser |
Tambourinaires
de La Pompadour, années 70: Emeregildo Videau Cucú (tamborita),
Chicote (cata), Ibrahim Baqué, Mandinga, Sayou (tumbas).
Chant d'ironie amère sur le manque de
réprocité. Si vous utilisez tous mes talents êtes-vous prêts à
m'écouter quand c'est moi qui ai des besoins. Le composé ne se prive
pas au passage de faire étalage de ses nombreuses capacités !
Une critique de ceux qui oublient le caractère d'entr'aide des
sociétés de tumba.
Se mue (C'est moi)
Compositeur : Pelayo
Terry, société La Pompadour, Guantánamo. Transcrit par Elisa Tamamés[112].
Chant de yuba
Pas
de lien audio
Créole
cubain et espagnol
(Cuba) (graphie Elisa Tamames) |
Créole
haïtien |
Français |
Ay
Pelay cum auyé Al
falta de un catayé |
Ay
Pelay kouman w ye? |
Ay
Pelayo, comment ça va? S'il
manque un catayé[113] |
Cobrero est un cubanisme désignant une personne apte à prêter
de l'argent, ou usurier. Pour aller à la fête de la tumba ce
participant demande à l'usurier de lui prêter de l'argent pour pouvoir
tenir son rang pour avoir par exemple un costume de bon niveau.
Après
la
Révolution, cette question n'a plus été posée dans les mêmes termes,
la pratique fut d'avoir des costumes fabriqués à partir de tissus
délivré par les instances culturelles municipales, à l'instar par
exemple des groupes de carnaval.
Mue
pale balinche (Je ne vais pas au bal l'air riche)
Ballet Folklorico Cutumba, Santiago de Cuba
Partie cobrero de la yuba
Lien audio Mue Pale balinche (Cutumba)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Mue
pale balinche |
Mwen
pa ale an bal rich è |
Je
ne vais pas au bal l'air riche |
La
chanson suivante est une variante sur le texte et la mélodie de la
précédente. Aucun élément ne nous permet de définir laquelle serait
à l'origine de l'autre. Andrea
Quiala Venet nous donne sa signification ce court chant en disant:
"Le chanteur dit qu'il va enlever les mauvaises herbes de son
chemin". Il faut le prendre au sens figuré, car l'aide de
Dieu est sollicitée. Peut être faut-il comprendre le texte sous
l'angle du danseur soliste s'apprêtant à exécuter le frenté. Il se
donne du courage et implore l'aide divine. La séquence du cobrero
est courte et fait le lien entre le yuba,
danse collective, et le frenté, danse individuelle et masculine.
C'est donc au moment du cobrero que le danseur se prépare à
réaliser sa performance, à se montrer le plus brillant possible dans
le frenté.
Ma pua le balise
Compositeur : inconnu. Transmis par Andrea Quiala Venet
Partie cobrero de la yuba
Lien audio Ma
pua le balise(Andrea Quiala Venet)
Lien audio Ma pua le
balise (Andrea Quiala Venet & La Caridad de Oriente)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Ma
pua le balise |
M'ap
pou ale balize |
Je
vais défricher |
L'indifférence
où
se trouve plongée une reine vieillissante et sa rancoeur face à ce
manque de reconnaissance
Mue mande cote secret mua ye (Je me demande où est passé mon
secret d'hier)
Compositeur : inconnu
Chant de mason
Lien audio Mue mande cote secret (Andrea Quiala Venet &
La Caridad)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Mue
mande |
Mwen
mande |
Je
me demande |
La
notion
d'argent est souvent présente dans le champ sémantique de la
séquence du cobrero. L'utilisation
de ce mot est aussi lié au rapport entre l'emprunteur et l'usurier .
Mamarracho (Fêtard)
Compositeur :
inconnu.Transmis
par Orlando Aramis Brugal Suarez, Conjunto Folklorico Babul,
Guantanamo
Chant de cobrero
Lien audio Mamarracho (Orlando Aramis Brugal Suarez)
Créole
cubain |
Français |
Mamarracho[116]
paga tua pa mue |
Fêtard,
paies pour moi |
En
utilisant le néologisme cumbanchando,
issu du verbe cumbanchar,
l'auteur nous invite à prendre du bon temps et faire la fête. Le
nom de famille du composé, Daudinot a été installé dans la région par un
Français du Béarn installé en 1809 grâce à une nationalité espagnole
acquise dans des activités madrilènes et à une amitié avec le grand
investisseur venu de Saint-Domingue, Prudent Casamajor, plus connu comme
Prudencio Casamayor, également d'origine béarnaise. Quatre fils et une
fille de ce Daudinot ont été propriétaires de caféières sur les flancs
de Monte Rus (et, peut-être, sur la zone proche de Bayate), en compagnie
d'autres familles (Heredia Girard...).
Cumbanchando (Parti faire la fête)
Collectage Elisa Tamames (cf. bibliographie)
Composé : Higinio Eugenio Daudinot, société La Pompadour
(Guantanamo)
Chant de mason
Espagnol (Cuba) |
Français |
Cumbanchando |
Parti
faire la fête |
Là
encore, les verbes sundungear
et mundungear
sont des néologismes. Le narrateur invite une fille a faire la fête,
ou à prendre du bon temps, avec un double-sens à peine voilé. L'aspect
répétitif du texte laisse supposer une mélodie gaie sur laquelle le
composé se laisse aller à improviser en privilégiant les
allitérations.
Vamos
a sundungear (Allons
faire la fête)
Compositeur : Pelayo Terry, société La Pompadour, Guantanamo.
Collectage : Elisa Tamames (1955. Cf. Bibliographie)
Chant de mason
Espagnol
(Cuba) |
Français |
Ay,
vamos a sundungear* |
Houla,
allons faire la fête! |
* Néologisme désuet sur la base de sandunguera : qui danse avec grâce et élégance
** Néologisme dérivé du créole
moundogue. Esprit congo du
vaudou haïtien réputé cannibale. On lui faisait offrande de viande de
chien. Ici le verbe mundungear
signifierait se comporter comme un chien ou japper. "Si
c'était pour faire la bamboche, il aurait bien sûr trouvé le moyen.
Qu'il faisait le moundongue que de tels enfants finissaient toujours par
tuer leur mère de chagrin" (Jacques
Stephen Alexis, Compère Général Soleil )
Les
ravages d'un abus de fête. Un maquillage outrancier peut être
démasqué à la faveur de la lune.
Ay
Caridad
(Oh, Caridad!)
Compositeur : inconnu.Transmis par Orlando Aramis Brugal
Suarez, Conjunto Folklorico Babul, Guantanamo
Chant de cobrero
Lien audio Ay Caridad (Orlando Aramis Brugal Suarez)
Créole
cubain |
Français |
Ay
Caridad |
Oh,
Caridad! |
Tumba de La Caridad (détail), Santiago de Cuba, 2017.
4.2.2
PIQUES
ET COMPÉTITIONS ENTRE LES CHANTEURS
Les chants suivant parlent du rôle tenu par le composé
dans la société de tumba francesa. Quel que soit l'évènement
public, d'autant plus lorsqu'il s'agit d'une rencontre avec une autre
société, il faut être le meilleur chanteur possible. Défi et
compétition dans les séquences de controverses improvisées ont
aujourd'hui disparus. Cette attitude entre les chanteurs est similaire
dans le regina du changüi et d'autres genres du
folklore afro-cubain (rumba columbia).
Au temps de l'esclavage, le goût de la puya a conduit au risque du châtiment corporel pour l'avoir osé. Un
exemple est donné dans le roman d'Emilio Via Crucis avec un chant
d'une fête de plantation de café, moquant le goût des Blancs pour les
esclaves noires, qui n'usent de leur légitime que « comme
oreiller » (cf 4.3.)
Par le passé ce type de chant a probablement été le plus
nombreux. Il supposait un nombre suffisant de composés masculins
potentiellement rivaux, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. Ces
chants se multipliaient naturellement : une satire entraînait une
réponse, et ainsi de suite. Leur caractère étant par nature éphémère,
peu ont été conservés par la tradition, à moins que la joute fût
effectivement mémorable.
Encore, dans les années '50 du XXe siècle, il n'y
a aucun composé femme dans le collectage d'Elisa Tamames. Il en ira
différemment à l'époque de l'ouvrage d'O. Alén dans les années '70.
A la fin du processus domine un petit nombre de composés, en particulier femmes, « sauveuses de mémoires » et on ne relève pas de nouveau chant de « puya ».
Le chant qui suit a connu
plusieurs versions, relativement similaires de par la mélodie et le
texte. La première version est vraisemblablement la plus ancienne et
a été collecté par Olavo Alén[117].
Nous noterons les railleries et coup bas qui fusent dans ce combat
de prose chantée.
Ey la Mangles o (Ô, hé là Mangles)
Compositrice : Andrea Herrera. Collecté par Olavo Alén[118]
Chant de frenté
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Ey la Mangles o |
Ey la Mangles o |
Ô, hé là Mangles[120] |
Rafael Cisnero Lescay, chanteur soliste de Cutumba, 2011 © Elena Olivo.
Cette
deuxième version est celle encore pratiquée par les chanteurs actuels.
Ay
dio Namangles o (Ô
mon dieu, Namangles!)
Compositeur
: inconnu.
Chant de yuba
Lien audio Ay dio Namangles o (Berta Armiñan Linares)
Lien audio Ay dio Namangles o (Maria Luisa Barrientos
Garbey)
Lien audio Ay dio Namangles o (Rafael Cisnero Lescay)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Ay
dio Namangles o |
Ay
dios[124]
Namangles o |
Ô
grand Dieu, Namangles |
Le
narrateur est ici présent dans une rencontre de tumba francesa et
annonce sa prestigieuse présence. S'en suit un paragraphe biblique sur
les pérégrinations de Jonas dans les entrailles de la baleine. L'auteur
s'en sert pour nous dire qu'il ne craint rien ni personne. Comme Jonas,
face à l'adversité, il se sort indemne de toutes situations. Celui
venant l'affronter dans une joute chantée est ainsi averti.
Pelayo
llegó (Pelayo
est arrivé)
Compositeur : Pelayo Terry, société
La
Pompadour, Guantanamo.
Collectage : Elisa Tamames (1955. Cf. Bibliographie)
Chant de yuba
Espagnol
(Cuba) et créole cubain |
Français |
Señores
Pelayo llegó |
Messieurs Pelayo est arrivé |
Toujours du même
Pelayo, visiblement capable grâce à ses prouesses vocales de faire
danser les plus rétifs.
Pelayo
cantó (Pelayo
a chanté )
Compositeur : Pelayo Terry, société
La
Pompadour, Guantanamo.
Collectage : Elisa Tamames (1955. Cf. Bibliographie)
Chant de yuba
Castillan
et créole cubain |
Français |
Ay
Pelayo cantó |
Houla, Pelayo a chanté |
Dernière
pique acérée de Pelayo à l'égard de ses rivaux dans les joutes
chantées de tumba francesa. Ils leur repproche leur manque de
musicalité et leurs façons à l'emporte-pièce. Ne doutant pas de ses
qualités, il conseille aux suivants copier ses textes, justifiant le
plagiat comme le vol des meilleurs. Notion d'ustensile intéressante,
il mentionne ici le cha cha, ou hochet metallique à ruban, qui est
agité habituellement par la "mayor de plaza" au sein du choeur.
Pelayo
canta contento (Pelayo
chante
de bon coeur)
Compositeur : Pelayo Terry, société La Pompadour, Guantanamo.
Collectage: Elisa Tamames (1955. Cf. Bibliographie)
Chant de yuba
Créole
cubain et espagnol
(Cuba) (graphie Elisa Tamames) |
Créole
haïtien |
Français |
Eh,
Pelayo canta contento |
Ay,
Pelayo kontan pou li chante |
Hé,
Pelayo chante de bon coeur |
Selon
Elisa Tamamés, le narrateur prône ici la réconciliation des danseurs
concurrent s'étant affrontés en solo face au tambour sur la séquence du
frenté. L'expression "animales con
ropa" (animaux endimanchés) est courante à Cuba. Elle fait
allusion au manque de raison de ceux portant un jugment trop hâtif.
Tout
sa sa fe mue la pen (Tout
cela me fait de la peine)
Compositeur : Pelayo Terry, société
La
Pompadour, Guantanamo.
Collectage : Elisa Tamames (1955. Cf. Bibliographie)
Chant
de yuba frenté
Créole
cubain et espagnol
(Cuba) (graphie Elisa Tamames) |
Créole
haïtien |
Français |
Caballero
tout sa sa fe mue la pen |
Cavalye
tou sa sa fe mwen la pènn |
Messieurs,
tout ceci me fait de la peine |
Le
composé vante ici sa capacité d'endurance à chanter et sa
réputation. Par sa vantardise, il cherche à affirmer son autorité
face à d'éventuels concurrents. Il est également question d'argent
demandé à une personne importante de l'assemblée, en mesure de
pouvoir rémunérer sa future performance vocale.
Don Joaquin mi historia no tiene fin (Sieur Joaquin, mon
histoire est sans fin)
Compositeur
: José Batalla[125].
Collecté par Elisa Tamames[126]
Chant de yuba
Pas
de lien audio
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Don
Joaquín |
Don
Joaquin |
Sieur
Joaquin |
Le
narrateur se moque ici ouvertement de l'assemblée, en particulier de son
chanteur soliste, ordinairement nommé composé. Il est à noter que
l'auteur utilise ici le terme samba pour désigner le chanteur soliste,
usage plus habituel dans les chants populaires ou religieux des
communautés haïtiennes. Le terme lui-même fait partie du vocabulaire du
créole local du 19e siècle (nous en avons des mentions écrites). Pour le
nom Daudinot voir la présentation de Cumbanchando, du même auteur en
4.2.1.
Siló u pe balansé (Si cela vous dit
de danser )
Collectage Elisa Tamames (cf. bibliographie)
Composé : Higinio Eugenio Daudinot, société La Pompadour
(Guantanamo)
Chant de yuba
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
U
campé lan ravin |
Ou
kanpe nan ravin |
Vous
pouvez danser dans ce vallon |
Zaida Rosa Vichi, composé de La Pompadour, 2001 © Buda music.
Où le narrateur cherche à être reconnu comme le meilleur chanteur de la société, suite au décès de son champion. L'auteur de cette chanson était encore en activité au sein de La Pompadour dans les années '80.
Campeón de Oriente (Champion
d'Oriente)
Extrait du répertoire de chant du CDROM Tumba vive, 2008,
UNESCO (cf. bibliographie)
Composé : Ibraín Baqué Sagarra, société La Pompadour (Guantanamo)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Campeón
de Oriente |
Chanpyon
Oriente a |
Le
champion d'Oriente |
Les deux chansons qui suivent sont issues d'une même base
dont nous n'avons pas avec certitude l'auteur, car beaucoup reprise et
transformée par chaque interprètes.
Le premier texte est issu du chansonnier d'Emilio Castillo Guzman
"Chichi" qui nous a été donné de consulter. Le fichier son que nous
lui avons adjoint est très proche, ici interprété par Zaida Rosa Vichi
Gibert (née en 1932) et La Pompadour.
Palmarito Cauto[127] (Palmarito
Cauto)
Compositeur : Amado González Duruthy, société La Pompadour,
Guantánamo
Chant de yuba
Lien audio Palmarito Cauto (Zaida
Rosa Vichi Gibert)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
La ba Palmarito Cauto[128] Conpose ki pe chante |
La ba Palmarito Cauto Konpose ki pe chante |
Là bas à Palmarito Cauto Le composé qui peut chanter |
Compose sa qui chante laba (Le composé qui peut chanter là-bas)
Compositeur : inconnu.Transmis
par Orlando Aramis Brugal Suarez, Conjunto Folklorico Babul,
Guantanamo
Chant de mason
Lien audio Compose sa qui chante (Orlando Aramis Brugal
Suarez)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Compose
sa qui chante laba |
Compose
sa ki chante laba |
Le
composé qui peut chanter là-bas |
Pou
ki nou jele mue
(Pour quelle raison m'appellent-ils?)
Compositrice : Ernestina Lamot Vegué, société La Pompadour, Guantánamo
Chant de mason
Pas
de lien audio
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Nan
sosyete Ponpadou Presidant yo pe jele mue |
Nan sosyete Ponpadou Prezidan yo pe jele mwen |
Dans la société Pompadour Leur président peut m'appeler |
Se
acabo la chorizera[135]
(La
plaisanterie est finie)
Compositrice : Zaida Rosa Vichí. Transmis par Amado González
Duruthy. Société La Pompadour, Guantanamo
Chant de yuba
Lien audio Se acabo la chorizera (Amado Gonzales Duruthy)
Créole
cubain |
Créole haïtien |
Français |
Bon
bo camarad Bon
bo camarad |
Bon
bo kamarad Bon
bo kamarad |
Mon
bon et beau camarade Mon
bon et beau camarade |
Amado Gonzalez Durruthy, composé de La Pompadour, années '80. DR.
A nou we band hipocrito
Compositeur : Amado González Duruthy,
société La Pompadour, Guantanamo
Chant de yuba
Lien audio A nou we
(Amado Gonzales Durruthy)
Créole
cubain |
Créole haïtien |
Français |
A
nou we band hipocrito |
An
nou wè band ipokrit o |
Nous
voyons bien, ô bandes d'hypocrites |
Addie
(Ma
poule)
Composé : Humberto Tito Robles "Yuyó".Transmis par Elivania
Lamot Lara, société de Bejuco
Chant de mason
Lien audio Addie (Elivania Lamot Lara)
Lien audio Addie (Société de Bejuco)
Créole
cubain |
Créole haïtien |
Français |
Addie[143]
a mason a mue |
Poul
mwen mason a mwen |
Ô
ma poule, pour le mason |
Danse
de frente. Avec Chichita, Pablo Arnaux (danseurs de dos), Calixto
Cambrón (catá), Clara Terry (la reine, sur la droite), Guantanamo années
'70 à l'occasion d'une rencontre entre La Caridad (Santiago) et La
Pompadour. C'est la plus ancienne photo de rencontre entre sociétés que
nous connaissons, antérieures à celles favorisées et systématisées par
la Casa del caribe © Barbán.
4.2.3 HOMMAGES AUX DÉFUNTS
La vie des Société se doit d'intégrer les
défunts qui lui son chers.
Lors
des veillées funèbres d'un membre de société de tumba francesa, on
servait l'ajiaco, plat traditionnel cubain : Sorte de
ragoût, avec des viandes et légumes variés, selon la
disponibilité. Tombé un peu en désuétude. Fernando Ortiz
définissait le pays comme un ajiaco, par allusion au rôle que les
cultures espagnole, africaine et caribéenne ont eu dans la
définition de l'identité nationale.
Julio Boulí, ayant appartenu à une société de Yateras (province de
Guantanamo) témoigne (Del
areito y otros sones, Marta Esquenazi Pérez, p.163,
terrain non daté) :
"Lors d'un enterrement, le
cortège funèbre se déplaçait du cimetière au salon de tumba où
ils effectuaient quelques tours. Tout au long du trajet, on
était habitués à jouer un air de mason, qui est le genre le plus
joyeux.
L'un d'entre eux disait à peu-près ceci :
"Di
yo ou n'pou ale si me mwen (Dis-leur
que tu me reverras)
Yo pe chache la jwa pou pèye sosyete (Ils recherchent la
joie pour la société)
Di youn pou ale si me mwen (Dis-leur que tu me reverras).
Neuf
soirs de suite après l'enterrement se tenaient des veillées.
Hormis les traditionnelles condoléances présentées à la famille
du défunt, des oraisons extraites de L'évangile selon le
spiritisme d'Alan Kardec étaient
entonnées. L'ultime veillée durait jusqu'au matin. On mangeait
le cochon fraîchement tué, buvions du café, tout en narrant des
élément de vie que l'assemblée avait partagée avec le défunt." (Graphie
créole et traduction de Daniel Mirabeau).
N. B. : Le spiritisme kardecien constitue une religion en soi à Cuba.
Si à l'époque moderne, les veillées funèbre sont moins longues, les hommages aux personnes disparues ne sont pas loin de constituer un genre en soi, qui peut être inséré à toutes représentations de la société de tumba francesa.
Voici des exemples avec les reines Clara Terry et Leonor Terry ou Elio
Revé.
Les
habitants de Guantanamo revendiquent le musicien Elio Revé (1930
-1997) comme l'un des leurs et d'autant plus Emilio Castillo qui a
des liens de parentés étroits avec les Revé. Le changüi et la
tumba francesa ont toujours évolué de pair, et même si les les uns
ne jouent pas la musique des autres, ils sont voisins ou de
famille et vivent dans le même milieu socio-culturel (une statue
d'Elio Revé est d'ailleurs exposée dans la Casa del changüi
faisant face au local de La Pompadour). De plus Elio Revé avait
été tambuyé (joueur de
tambour) dans la tumba francesa avant de devenir timbalero (d'où certaines particularités de son jeu aux timbalès).
Elio Revé (Elio Revé)
Composé: Emiliano Castillo Guzmán, société La Pompadour,
Guantánamo
Chant de mason
Pas
de lien audio
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Elio se rua changüí |
Elio se rwa changüí |
Elio c'est le roi du changüi |
Elio Revé (1930 -1997). DR.
Il
est courant à l'époque moderne que les chants aux disparus soient en
castillan, le but recherché étant d'être compréhensible par le plus
grand nombre, non pas seulement par les locuteurs de patuá
de la société[145].
Clara Terry Dupuy (1908-2007) fut l'une des reines et composé de la
Pompadour.
Clara Terry (Clara
Terry)
Composé: Ernestina Lamot Vegué, société La Pompadour,
Guantánamo. Transmis par Emiliano Castillo Guzman
Chant de mason
Pas
de lien audio
Espagnol
(Cuba) |
Français |
Clara
Terry tu voz no se oye mas |
Clara
Terry ta voix en s'entend plus |
Leonor Terry Dupuy © Dialnet.
Leonor
Terry (Leonor Terry)
Composé: Amado González Durruthy, société La Pompadour, Guantánamo.
Collecté par Manuel Coca Izaguirre et cité dans sa thèse (cf.
bibliographie)
Espagnol (Cuba) | Français |
Leonor
Terry, no puede bailar masón Leonor Terry, no puede bailar masón Que Dios la tenga en la gloria Y la lleve a descansar Que Dios la tenga en la gloria Y la lleve a descansar Leonor Terry, su voz no se oye más Leonor Terry, su voz no se oye más Que Dios la tenga en la gloria Y la lleve a descansar Que Dios la tenga en la gloria Y la lleve a descansar |
Leonor
Terry, on ne peut danser le mason Leonor Terry, on ne peut danser le mason Que Dieu la tienne dans sa gloire Et la laisse reposer (en paix) Que Dieu la tienne dans sa gloire Et la laisse reposer (en paix) Leonor Terry, sa voix ne s'entend plus Leonor Terry, sa voix ne s'entend plus Que Dieu la tienne dans sa gloire Et la laisse reposer (en paix) Que Dieu la tienne dans sa gloire Et la laisse reposer (en paix) |
Dans
cette création, l'auteure rend hommage aux défunts de sa
famille : sa grand-mère (Yoya), sa mère (Melina) et sa tante
(Tecla). Toutes trois ont jouées un rôle important dans la vie de
la société Lafayette. Yoya a aussi été hommagée dans une chanson
de l'album Para Yoya du
pianiste disparu Alfredo Rodriguez, où on retrouve aussi son
surnom familier (« Yoya, Yoyita »).
M'ap
jele Yoyi
Compositrice :
Andrea Quiala Venet, société La Caridad de Oriente. Transmis par
Andrea Quiala Venet
Chant de yuba
Lien audio M'ap jele Yoyi
(Andrea Quiala Venet)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
M'ap
jele Yoyi[146] |
M'ap
jele Yoyi |
J'appelles
Yoyi |
Yoya Venet Danger, 1993 © Daniel Chatelain.
Parfait exemple de créole cubain, du XIXe siècle, le fragment de chant de tumba francesa le plus anciennement transcrit est -en admettant son authenticité- une satire sociale. Périlleuse car visant un maître pouvant user de tous les droits sur sa "dotation". Mais d'autant moins contestable pour les offensé(e)s que parmi celle-la, il y avait souvent des descendants illégitimes du maître! Il a été publié par Emilio Bacardi Moreau, d'ascendance paternelle catalane et maternelle franco-dominguoise, longtemps maire de Santiago sous la jeune République et auteur de chroniques sur sa ville qui mettent entre autres en valeur l'héritage culturel des réfugiés de Saint-Domingue. Ceci dans un roman où les planteurs descendants de Français sont confrontés à la guerre d'indépendance cubaine, Via Crucis, paru en deux parties en 1910 & 1914. Il est inséré dans une page décrivant une fête de tumba francesa dans une plantation de café du temps de l'esclavage (traduction de la page dans D. Chatelain, 1996, p. 20).
Blan
la yo (transcrit
par Emilio Bacardi Moreau)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Blan
la yo qui sorti en Frans, oh jelé...! Yo pren madam yo servi sorelle!... Pu yo caresé neguès...! |
Blan
la yo ki sòti nan Frans O jele Yo pran Madanm yo servi zòrye Pou yo karese nègès |
Ces
blancs qui viennent de France, il faut le dire! Prennent leurs dames pour servir d'oreiller Pour mieux caresser les négresses... |
A la suite du chant, Bacardi Moreau écrit : "Et vibra dans l'espace la dernière syllabe, longue, prolongée, plaintive, haletante, comme un "ay!" qui va se perdre dans les airs ; imprécation contre l'asservissement, protestation d'impuissance et plainte de rejeté de l'humanité. Ce chant, défoulement innocent et pathétique à la fois, se vengeait du maître par les paroles contenant l'idée qui blesse la race opprimée, accompagnant les notes de musique d'un chant de douleur infinie."
De
l'ingratitude des jeunes générations.
La
jenes o (Ô,
la
jeunesse!)
Compositeur : José Caridad. Transmis par Andrea
Quiala Venet, société La Caridad de Oriente, Santiago de Cuba.
Chant de mason
Lien audio La jenes o
(Andrea Quiala Venet)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
La
jenes o |
Lajenès
o |
Ô
les jeunes |
Délogé
au milieu de la nuit, le propriétaire crie l'injustice dont il est
victime. Un conflit de société rurale, comme l'est le village de
Bejuco.
Bartolo
Compositeur : inconnu.Transmis par Elivania Lamot Lara, société
de Bejuco
Chant de yuba
Lien audio Bartolo (Elivania Lamot Lara)
Lien audio Bartolo (Société de Bejuco)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Ay
ma rele Bartolo |
Ay
m'a rele Bartolo |
Ay,
j'appelle Bartolo |
Dans
ce récit, le narrateur repproche à son compagnon de route d'avoir
dépensé tout le budget du retour. Au vu que ce dernier a également
perdu charrette et boeufs, il est à supposer qu'il ait le vice du
jeu ou de la boisson. Des deux localités cités, la première est dans
la province de Las Tunas et la deuxième dans celle de Ciego de
Avila.
Chimé peladero buchié (La route
pour Peladero est compromise)
Compositeur : José Batalla, société
La
Pompadour, Guantanamo
Collectage : Elisa Tamames (1955. Cf. Bibliographie)
Chant de yuba
Créole
cubain (graphie Elisa
Tamames) |
Créole
haïtien |
Français |
Eh,
chimé Peladero buchié |
E,
se chemen an nan Peladero bloke |
Hé,
la route pour Peladero est compromise |
Chant
de satire sociale. Le
moment délicat de payer l'adition autour d'une table. Le
protagoniste incite une femme, qui croyait peut-être être
galamment invitée, à partager les frais.
Mamá ue lele (Maman,
on
a besoin d'aide!)
Compositeur : Luis Garzón Heredia.
Chant de prélude
Lien audio Mamá
ue Lele (Cutumba)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Ello
mamá[148]
ue le[149] |
E
yo manman wè l'èd |
Eh
maman, on a besoin d'aide |
Sur
le même genre de situation, le moment de payer une addition salée
et de la partager équitablement.
Que cuenta vamos a dividir (Quelle addition nous allons
partager)
Compositeur : inconnu.
Chant de mason
Lien audio Que cuenta vamo a dividir (Andrea Quiala Venet
& La Caridad de Oriente)
Espagnol
(Cuba) |
Français |
Ey,
vamo a dividir ya |
Hé,
nous allons partager maintenant |
Comme
pour la chanson précédente, la beuverie et le rhum sont au centre
des moqueries et saillies comiques du texte suivant.
Il s'agit ici d'une chanson où le narrateur est visiblement en
état d'ébriété. Les deux versions audio nous montrent que selon
les interprètes et les circonstances, le texte peut être adapté
d'un mason à un yuba.
Asi na'ma' tradicionero (Il suffit, traître!)
Compositeur : Amado González Duruthy, société La Pompadour,
Guantanamo
Chant de mason
Lien audio Asi
na ma (Amado González Duruthy)
Lien audio Asi na ma (La Pompadour)
Créole
cubain |
Français |
Asi
na'ma' traicionero |
Comme
cela il suffit, traître |
Un
problème matrimonial. Madame reproche à son mari de trop sortir et
de dilapider l'argent du ménage
Fanma dirí jaim (Femme, pourquoi
fais-tu la tête?)
Compositeur : José Batalla, société
La
Pompadour, Guantanamo
Collectage : Elisa Tamames (1955. Cf. Bibliographie)
Chant de yuba
Créole
cubain (graphie Elisa
Tamames) |
Créole
haïtien |
Français |
Fanma
dirí jaim |
Fanm
mwen di ri janmè |
Ma
femme dit que cela ne la fait pas rire |
Mue viv an anvian lemond (Je vis en enviant le monde)
Compositeur : inconnu.Transmis
par Elivania Lamot Lara, société de Bejuco
Chant de mason
Pas
de lien audio
Danse du frenté, Flavito Figueroa à la danse, Argelis au premié, Flavio Figueroa au bula, société La Caridad de Oriente, 2012, présentation pour Ritmacuba à Santiago © D. Chatelain / Ritmacuba.
Ay don nan pué la yan (Hélas,
quand l'argent manque)
Compositeur : Pelayo Terry, société
La
Pompadour, Guantanamo.
Collectage : Elisa Tamames (1955. Cf. Bibliographie)
Chant de yuba
Créole
cubain et espagnol
(Cuba) (graphie Elisa
Tamames) |
Créole
haïtien |
Français |
Ay
don nan pué la yan |
Ay,
lè ou pa bay lajan ankò |
Hélas,
quand on ne donne plus d'argent |
La
narratrice
savoure sa chance de faire un petit déjeuner complet (chocolat au
lait, pain, beurre,...). Elle se sait enviée et tous n'ont pas ses
possibilités. Le compositeur Pelayo Terry situe l'action durant la
seconde guerre mondiale, période où le marché noir allait bon
train.
La
leche de condensa (Le
lait concentré)
Compositeur : Pelayo Terry, société La Pompadour, Guantanamo.
Collectage : Elisa Tamames (1955. Cf. Bibliographie)
Chant de yuba
Espagnol (Cuba) |
Français |
La
leche de condensa Ay
tu quieres leche con chocolate |
Le lait condensé Tu
veux du chocolat au lait |
De
la solidité du ménage et des infidélités d'un mari.
Mue di no mue a fe comue pa we cle (Ma commère, dans cette
affaire, j'ai rien vu venir!)
Compositeur : inconnu
Chant de prélude
Lien audio Mue di no mue a fe comue pa we cle (Andrea
Quiala Venet & La Caridad)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Mue
di no mue a fe comue |
Mwen
di no mwen afè komè |
Ma
commère, dans cette affaire |
Il
s'agit dans la chanson suivante de dénoncer un règlement de compte
crapuleux. Sous un regard contemporain, le texte est polémique car
il utilise un adjectif raciste pour parler de la cupidité de l'un
des protagonistes. Andrea Quiala Venet a elle une version plus
consensuelle de la même chanson (voir plus bas).
Ay, we israelitas (Hélas, regarde ces juifs)
Compositeur
:
José Venet Danger. Chanteuse: Consuela Venet Danger
Chant de yuba
Enregistrement de 1979, Société Lafayette et Pompadour réunies,
Guantanamo
Lien audio Ay we israelitas (Consuela Venet Danger)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Ay we israelitas yo
estaban chache Larjan para que chelbe
ou Larjan
pa' kit a nu chelbe ou |
Ay
wè israelit a yo estaban[155]
chache Lajan
para que[156]
chèlbè ou
Larjan pa' kit a nou chèlbè ou |
Hélas
regarde, ces juifs[157]
sont allés chercher L'argent
pour que votre cher et beau L'argent
pour que nous quitte votre cher et beau |
Oye
Israelita
(Ecoutes,
Israelita!)
Compositeur : José Venet Danger. Version
et graphie d'Andrea Quiala Venet (2010)
Lien audio Oye Israelita (Andrea Quiala Venet)
Oye
Israelita[159]
yo tape chache larjan
Po ya touye mue
Larjan si u quite yo chembe u no
Oye Israelita yo tape chache larjan
Po ya touye mue
Larjan si u quite yo chembe
Pou yo touye mue
Les
règlements
de comptes, dénonciations et vols son fréquents dans les chansons
de tumba francesa.
Ou
we lajan muen pedi
(Voyez-vous, l'argent que j'ai perdu)
Auteur : Pablo Valier. Compositeur : Juan Gualberto Vichi[160].
Transmis par Emiliano Castillo Guzman, société La Pompadour,
Guantánamo
Chant de yuba
Pas de fichier audio
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Ou we lajan muen pedi |
Ou wè lajan mwen pèdi |
Voyez-vous l'argent que j'ai perdu |
Pablo
Valier. Fils d'un mambí (combattant de l'indépendance) et
neveu du général indépendantiste Antonio Maceo "Le titan de
bronze".
Il
y a une crainte obsessive des mauvaises langues dans les milieux
populaires cubains, conjurées derrière les portes des maisons par
des illustrations sans équivoques. Le récitant prend Dieu à témoin
de la fausseté des accusations diffamantes d'alcoolisme faîtes à
dessein pour le marginaliser et l'ostraciser.
Señor
se klè
(Seigneur, c'est clair!)
Compositeur & interprète : Pablo Valier,
Société La Pompadour, Guantanamo
Enregistrement de 1976[161]
Chant de yuba
Lien audio Señor se klè (Pablo Valier & La Pompadour)
Créole
haïtien |
Français |
Señor se klè E ye ye ye ye |
Seigneur,
c'est clair |
La disgrâce et les rumeurs, maintenir sa
réputation quelque soit ses moyens financiers est une
préoccupation majeure dans les chansons afro-cubaines[164].
Pove bebecito (Pauvre
Petit!)
Compositeur : Juan Gualberto Vichí, société La Pompadour, Guantanamo
Chant de yuba
Lien
audio Pove bebecito (Amado Gonzales Duruthy)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Nou we pove bebecito
|
Nou
wè pòv bebe Quita sa pale pou mwen |
Vois-tu,
petit |
We
aye o
(Voyez-vous, hier)
Compositeur
: inconnu. Transmis par Andrea Quiala Venet, société La Caridad de Oriente, Santiago de Cuba
Chant de mason
Lien audio We aye
o (Andrea Quiala Venet)
Lien
audio We aye o (Andrea Quiala Venet & La Caridad
de Oriente)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
We
aye o |
Wè ayè o |
Vois-tu, hier |
Tumberas de La Pompadour, années 2000.
La
jeunesse
se contente de voir passer la conga et prendre du bon temps, mais
il faut gagner sa vie et la solution du protagoniste est d'aller
chercher des boeufs dans la région d'élevage de Camagüey. Ce chant
serait antérieur à la Révolution (après laquelle l'abattage et le
commerce privé de viande de boeuf est interdit). La question est
posée d'une version antérieure en créole, étant donnée l'existence
d'une version créole des derniers vers (voir la note de la fin du
texte).
A la juventud vengan a ver[171]
(Ils viennent voir la jeunesse)
Compositeur : Luis Garzón.
Chant de mason
Lien audio A la
juventud (Nancy Garcia Vinent & Galibata)
Lien audio A la
juventud (Cutumba)
Créole
cubain |
Français |
(Introduction
sans tambours) A la juventud vengan a ver
hombre (Chant
accompagné) Ako mand o los bueyes de
Camagüey E
nan mise la E nan misè la |
(Introduction
sans tambours) La
jeunesse ils viennent voir monsieur (Chant
accompagné) Ô
me donnes-tu ton accord pour les boeufs de Camagüey? Eh,
dans la misère Eh,
dans la misère |
Le
chant qui suit est très proche de l'un des paragraphes du
précédent. La mise en regard des deux textes permet
d'envisager les changements sémantiques induits par d'infimes
variations de prononciation.
Coman
do bueyes de Camagüey (Comment faire pour les boeufs de
Camagüey?)
Compositeur : inconnu.Transmis par Berta Armiñan Linares, du
Conjunto Folklorico de Oriente
Chant de mason
Lien
audio Coman do bueyes de Camagüey (Berta Armiñan Linares)
Lien audio Coman do bueyes de Camagüey (Andrea Quiala Venet)
Lien audio Coman
do bueyes de Camagüey & tumba La Caridad
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Coman
do bueyes de Camagüey |
Kouman
do bueyes de Camagüey |
Comment
faire pour les boeufs de Camagüey ? |
Les
meilleures
fêtes ont une fin. Le protagoniste doit s'en retourner dans son
village; la route est présumée longue. Malgré tout, le moment des
adieux est joyeux : les phrases courtes et les répétitions du texte
laissent supposer une mélodie gaie et entraînante. Ce village isolé est aujourd'hui
connu pour les manifestations culturelles de sa communauté d'origine
haïtienne.
Ay Panchita yo me voy ya
Compositeur : José Batalla.Texte
écrit
vers 1910
Collectage : Elisa Tamames (1955. Cf. Bibliographie)
Chant de yuba
Créole
cubain (graphie Elisa
Tamames) |
Espagnol
(Cuba) et créole haïtien |
Français |
Ay
Panchita yo me voy ya |
Ay
Panchita yo me voy ya |
Hélas
Panchita, là je m'en vais |
Une
situation dramatique. Le malheur, l'abandon perfide par celle qu'on
croyait la plus proche.
Mue
contan
(Je suis content)
Compositeur : inconnu.
Chant de mason
Lien
audio Mue contan (Société La Caridad de Oriente)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Mue
contan |
Mwen
kontan |
Je
suis content |
Le
thème
du chant suivant est proche de "Patriot mwen"[181], mais sans les mentions des
esprits congos. Le texte n'explique pas pourquoi le narrateur a
été atrappé ni par qui. Il parle des membres d'une communauté
(vodouisant, de tumba francesa, ethnique...) et leur supplie de
payer, car sinon il sera assassiné[182].
Padrino
mue
inocente (Ils
m'ont
cueilli, je suis innocent!)
Compositeur :
inconnu.
Chant d'introduction à un mason
Lien
audio Padrino mue inocente (Cutumba)
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Queyi
padrino mue inocente |
Keyi
yo m' padrino[183]
mwen inosant |
Ils
m'ont cueilli parrain, je suis innocent |
Les
deux
textes suivant sont très proches, probablement que l'un a servi de
base pour créer l'autre. Dans le premier texte, le narrateur nous
fait part de son désarroi, sans en indiquer la cause. Le deuxième
n'est guère plus explicite, mais apporte la précision d'une
tentative de réconfort de la part d'une autre personne.
Mu
vlé mué contan (J'aimerais
vous
voir content)
Compositeur : Pelayo Terry, société La Pompadour, Guantanamo.
Collectage : Elisa Tamames (1955. Cf. Bibliographie)
Chant de yuba
Créole
cubain et espagnol
(Cuba) (graphie Elisa Tamames) |
Créole
haïtien |
Français |