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- HOMMAGES A OSCAR LOPEZ : UN FILM, UN ARTICLE -
« PARIS - LA HAVANE ALLER RETOUR»
- Portrait d'Oscar López -
Un film de Claudine Jobet et de Philippe Jobet
France / Cuba / documentaire vostf
couleur 1h10 (vidéo)
La présentation en avant-première du film documentaire (70') de Claudine et Philippe Jobet sur Oscar López a eu lieu à Créteil le 6 octobre 2005. La lettre ritmacuba-info n°59 s'est faite l'écho de ce événement.
"Rares sont les artistes cubains installés à Paris au cours du XXème siècle qui ont pu livrer leur témoignage à un large public. Disparu l'année dernière, Oscar López en fait partie. Le film lui donne la parole et le suit dans ses rencontres musicales tout au long des années 1990 à Paris, en incluant une belle escapade à La Havane.
Mêlant souvenirs, images d'archives, concerts et de la musique sous toutes ses formes, ce documentaire cherche à diffuser un peu de la mémoire d'un chanteur hors du commun, avec la participation d'autres artistes, jeunes et moins jeunes, qui ont partagé avec Oscar un même univers musical."
Les réalisateursLe film a été ensuite présenté, notemment, au festival "Étonnants Voyageurs" de Saint-Malo le 28 mai 2007 en présence de ses auteurs, de même à Paris en 2015.
Le 1er juillet 2023 , Claudine et Philippe Jobet ont décidé de rendre public leur film sur Vimeo
Oscar López, le chant de La Havane
par Claudine Jobet
De nombreux lecteurs ont pu récemment (re)découvrir ce grand artiste cubain d’un certain âge, Oscar López, qui a chanté partout en France aux cotés du jeune orchestre ‘Mambomania’, tout au long des années 1990. C’était sa dernière activité avant de quitter la scène. Oscar, dont la vie est remplie d'un siècle de musique, de voyages, de rencontres, est toujours parmi nous, quelque part à Paris, où il a choisi de rester depuis bien avant la révolution cubaine de 1959. Son travail incessant témoigne de la vitalité de la musique cubaine et du long engouement pour les rythmes afro-caribéens que le public parisien – et plus largement européen – a su manifester. Nous l'avons rencontré à la fin des années 1980 et, depuis, il nous a livré de nombreux souvenirs qui ont fait l'objet d'un récit autobiographique inédit et d'un film documentaire.La musique dans La Havane des années 1930
Imaginons-nous La Havane des années 1930, lorsque les disques étaient encore rares et que les orchestres jouaient en direct devant leur public dans les studios de nombreuses radios, où les chanteurs portaient très loin la voix, habitués comme ils étaient à chanter sans micro. Oscar López connaît bien cette époque, qui était celle de ses débuts professionnels. En fait, il n'envisageait pas de devenir chanteur, seulement il aimait chanter, encouragé par l'enthousiasme de ses camarades ouvriers de la manufacture de cigares Romeo y Julieta qui, suivant une vieille tradition, le sollicitaient souvent pour rouler les feuilles de tabac en musique. Puis, invité une première fois à participer à un gala d’une association de « gens de couleur » le 31 décembre 1935, il n'a plus jamais cessé de chanter.
Il faut dire qu'à Cuba, comme chacun sait, la musique surgit à tous les coins de rue, et Oscar a eu la chance d'écouter dans son enfance les sextetos et septetos (Habanero, Cuba, Boloña …) qui répétaient à deux pas de chez lui, dans le quartier de Pueblo Nuevo à La Havane. C'est ainsi qu'il a commencé à fréquenter, par exemple, Ignacio Piñeiro, l’un des plus grands compositeurs cubains, fondateur du Septeto Nacional.
Il connaît tout, Oscar, depuis la venue des premiers musiciens cubains en Europe, jusqu’aux anecdotes qui se cachent derrière La Engañadora (le premier cha-cha-cha), en passant par l’arrivée du danzón au Mexique, où il est toujours d’actualité. Généreux et désintéressé, Oscar pouvait tout raconter, mieux que quiconque et bien avant les publications qui circulent actuellement. Et pour cause : acteur de premier plan, possédant une mémoire exceptionnelle, son univers est celui de la musique populaire, qui puise une grande partie de son savoir dans la tradition orale. Il connaît aussi tous les grands musiciens cubains, ou presque, et certains sont devenus des fidèles amis, comme Celia Cruz récemment disparue, ou le compositeur, directeur d'orchestre et pianiste Bebo Valdés.Des arrangements originaux.
Laurent Erdos, co-fondateur avec Marc Vorchin de Mambomania, nous évoquait lors d’une interview la surprise générale quand Oscar arrivait aux premières répétitions de l'orchestre avec tout un paquet de partitions sous le bras. C’étaient des arrangements originaux que de grands compositeurs comme Dámaso Pérez Prado (celui qui a donné ses lettres de noblesse au mambo) ou El Niño Rivera avaient écrit spécialement pour lui. Oscar les prenait avec lui à chaque fois qu'il partait travailler quelque part, que ce soit en Europe, au Mexique, aux Etats-Unis …
Il a commencé en chantant des danzonetes (mélange de son et de danzón) au sein de formations de type charanga puis il a interprété des boléros, sones, cha-cha-chas ... Au début, dans les orchestres d’Obdulio Morales, Madrid, Cosmopolita, Habana Casino … Mais il avait aussi un répertoire bien à lui, qui incluait des compositions de grands maestros comme Obdulio Morales ou Gilberto Valdés, ce qui a éveillé l'intérêt d’Ernesto Lecuona. Celui-ci l'engagea, dès la fin des années 1930, pour plusieurs tournées internationales au sein d’une compagnie à Porto-Rico, en Argentine, au Chili, au Pérou... Bola de Nieve, parmi de nombreux autres artistes, était de ces voyages. On retrouve encore Oscar aux cotés de Rita Montaner, dans la version cinématographique de la zarzuela María la O, de Lecuona.`
Venu à Paris la première fois en janvier 1951, Oscar a été embauché tout de suite dans des cabarets et dancings. A l'âge d'or du mambo et du cha-cha-cha à Paris, les chanteurs et percussionnistes cubains étaient rares et très appréciés par les orchestres français. C’est ainsi qu’il a travaillé longtemps avec Raymond Legrand, Eddy Warner, Los Cangaceiros, pour ne citer que les orchestres les plus connus.
©Collection Oscar López
La reconnaissance à La Havane
Il n'a pourtant jamais rompu les ponts avec son île natale. A chaque retour à Cuba, l’attendaient à nouveau d’intenses périodes de travail à la télévision et à la radio, puis sont venus les hommages, la reconnaissance des musiciens et les interviews dans la presse. Comment oublier, par exemple, l’image d’Oscar accompagné de soixante-quatre musiciens interprétant le boléro Campanitas de Cristal (du célèbre compositeur et guitariste portoricain Rafael Hernández) lors de la soirée de clôture du festival havanais Boleros de Oro en 1989 ?
Lorsque nous avons suivi Oscar pour filmer son retour à La Havane en 1995, nous ne savions pas que nous allions enregistrer des pages d’histoire : ses retrouvailles avec les sœurs Castro, fondatrices de l’orchestre féminin Anacaona, qui jouait en plein air sur la promenade du Prado dans les années 1930 et qui, lors d’une de ses nombreuses tournées internationales, a partagé la scène de l’hôtel Les Ambassadeurs à Paris avec Django Reinhardt et Stéphane Grappelli, juste avant la guerre, en 1938 ; avec les anciennes danseuses de la compagnie 'Las Mulatas de Fuego', qui furent les premières à montrer aux Américains comment danser le mambo et qui, un soir de notre séjour, ont dansé une rumba chez Chocolate, percussionniste avec qui Oscar avait travaillé au cabaret Habana-Madrid de New York en 1949 ; avec Enriqueta Almanza, pianiste décédée depuis, qui a accompagné les plus grandes voix du boléro et du feeling à La Havane et qui, n’aimant pas les lumières de la scène, a joué dans l’ombre son arrangement du célèbre pregón El Botellero, composé par Bebo Valdés, pour accompagner Oscar un soir au salon Boleros du club Dos Gardenias ; avec Miguel O’Farrill, flûtiste qui a parcouru de nombreux pays au sein de l’orchestre d’Enrique Jorrín, le créateur du cha-cha-cha ; avec Orlando Cachaíto López, le contrebassiste venu souvent en Europe ces dernières années, ou encore avec le pianiste Rubén González, qui vient de nous quitter.
Celia Cruz, Oscar López, Pedro Knight. Paris 2003. Photo : José "El Che"
La « vogue soudaine de la musique cubaine à Paris » dont parlait Alejo Carpentier dès la fin des années 1920 est loin d’être disparue. C’est cette grande famille de la musique afro-cubaine – disons plutôt afro-caribéenne –, à laquelle Oscar López appartient, qui se charge de la faire perdurer.© Claudine Jobet
Paris, janvier 2004/mai 2015
Première publication : Salsa Rumba Magazine, N° 21, Paris, février 2004
Roman d'Oscar Hijuelos avec Oscar Lopez en couvertureClaudine Jobet : Est née au Chili de père français et de mère chilienne. De formation pluridisciplinaire, elle a effectué des recherches en sociologie de la musique et en littérature orale sur la musique cubaine en France. Elle est coréalisatrice, avec son frère Philippe Jobet, du documentaire sur Oscar López « Paris-La Havane Aller-Retour » (Arca productions, 2005). Elle est enseignante en espagnol & civilisation latino-américaine à l'Université Paris XIII.
Renseignements / Contact avec les auteurs : info@ritmacuba.com
Avec Las Mulatas del Fuego
© Collection Oscar López
Sur la disparition d'Oscar López
Avec la disparition d'Oscar López survenue à l'âge de 86 ans à Paris le 10 avril 2004, se boucle un cycle de vingt ans qui a vu s'évanouir les participants de la trop méconnue scène parisienne de la période de l'âge d'or - pré- révolutionnaire - de la musique cubaine, dont les participants ont continués de cheminer sous nos cieux, vaille que vaille entre 'guajira guantanamera' et cha cha chas dans les années "Che Guevara" (qui étaient aussi les années yéyés), avant les premiers frémissements parisiens des années '70 autour de la Salsa. Ce cycle avait commencé par la mort à Paris du chef d'orchestre Raúl Zequeira en 1984. Il finit par les disparitions successives du guitariste Don (Emilio) Baretto (présent à Paris depuis les années 20'!) puis, de son frère percussionniste, Sergio Baretto, ou encore le trompettiste "Pepín" Vaillant (qui était retourné il y a bien longtemps vers son Santiago de Cuba). Oscar López, au bout de sept décennies de carrière, a été le dernier des... Siboneyes (et non des Mohicans!) de cette Histoire des musiciens cubains débarqués à Paris avant la Révolution cubaine, un temps où on ne parlait pas encore de "musique cubaine en exil" et qui n'a pas encore été conté dans le détail. C'était un bonheur de l'entendre il y a encore peu d'années avec ses amis de 'Mambomania'. Claudine Jobet, co-auteur d'un film vidéo sur Oscar López nous offre ici un hommage écrit, hommage informé, amical et ému à la voix cubaine de Paris, qu'elle a écrit trois mois avant le décès du chanteur, à l'âge de 86 ans. (Daniel Chatelain, avril 2004) Photo : © Collection Oscar López
Un spectacle-hommage, très réussi et émouvant, a eu lieu le mercredi 9 juin 2004 (La Java, Paris) avec Yemaya La Banda et Mambomania, ainsi que la projection d'un extrait du film réalisé par Claudine et Philippe Jobet, sur le parcours et la vie d'Oscar López.
Avec Las Mulatas del Fuego (photo N & B colorisée)Réactions, Témoignages
- Je découvre au hasard d'une navigation sur le net, à la recherche de traces de mon ami Oscar Lopez, qu'il est décédé en 2004, ce dont je me doutais, hélas, vu son age (...) J'ai moi-même connu Oscar et Monique dès 1968, quand ils tenaient rue des Ecoles le "Habana Paris". Au sous-sol, en fin de semaine, assis au piano, accompagné de quelques musiciens cubains, Oscar chantait "Moliendo café", "Siboney", et quantité d'autres chansons... (J-M Devauges) mai 2008.
Une rencontre autour du film :