CHANTS
DES COMMUNAUTES
HAITIENNES DE CUBA
Daniel Mirabeau
Les chants de cet article ont étés collectés auprès de chanteurs et
chanteuses à Cuba, ainsi qu'à partir d'enregistrements commercialisés
et de captations vidéos disponibles sur la toile.
Les traductions, transcriptions musicales et annotations sont de
l'auteur. Les textes de chansons comprennent deux ou trois entrées
linguistiques: créole cubain, créole haïtien et français.
La version créole cubain respecte graphie et prononciation des
personnes ayant transmis les chants.
La version créole haïtien approche la graphie contemporaine du créole
en Haïti[1].
La version française tente d'approcher le sens du texte originel.
Pour
les
noms propres et les noms de styles musicaux, le contexte de la phrase
fait préférer la graphie en créole cubain, créole haïtien ou en
français.
A l'intérieur des textes de chanson, la partie soliste figure sur la
colonne de gauche et la réponse du chœur sur la colonne de droite, en
italique.
Concernant les partitions musicales, la voix soliste et le chœur se
différencient par leur police de caractère. Les micro-variations des
reprises du soliste sont une libre interprétation de l'auteur. Toutes
les chansons sont volontairement unifiées sans altérations, hormis les
accidentelles. A chacun des interprètes de transposer les partitions
en fonction de sa tessiture de voix.
Apparaissent au cours de cet article les chants interprétés par les
groupes suivants:
Caidijé, La Bel Kreyol[2]
(Camagüey), Lokosia, Agüe, Babul, Ban Rara (Guantanamo), Conjunto
Folklorico de Oriente, Cutumba, Galibata, Grupo Thompson (Santiago de
Cuba), La Caridad, Pilon de Cauto (Palma Soriano), Renacer haitiano
(Ciego de Avila).
TABLE DES MATIÈRES
1. Les contredanses
1.1 Eliansé
1.2 Minué
1.3 Lété
1.4 Polka
1.5 Vals
2. Genres carnavalesques ou apparentés
2.1 Gaga
2.1.1 Gaga chay
2.1.2 Gaga pingué
2.2 Kanekela
2.3 Rasiñe
2.4 Cunyai
3.Genres profanes de distraction
3.1 Masún
3.2 Merengué
3.3 Simbi / Fey
4. Genres religieux
4.1 Rezo
4.2 Yanvalu
4.3 Daomé
4.4 Maisepol
4.5 Nago
4.6 Congo layé
4.7 Ibo
Remerciements
Discographie
Vidéos de l'auteur
Publications de l'auteur sur les traditions haïtiennes de Cuba
Bibliographie
Index alphabétique des chants
INTRODUCTION
Les chansons rassemblées dans cet article des chants font partie
du patrimoine culturel de la communauté haïtienne de Cuba. Deux
siècles d'immigration des habitants de l'île de Saint-Domingue ont
marqués en particulier la région orientale de Cuba, dans les zones de
Santiago, Guantanamo, Las Tunas et Camagüey.
Le processus nommé « transculturation » dans le champ
sémantique de l'anthropologie décrit l'évolution
culturelle d'une population immigrée. Dans le cas présent de
ce que nous nommerons les Haïtiens de Cuba, l'un des marqueurs les
plus significatifs de cette transculturation, c'est la transformation
de leur langue d'origine.
La langue des premiers immigrés de l'île de Saint Domingue est un
créole très similaire à celui usité dans le reste des Antilles
françaises. Le parlé créole s'est considérablement transformé à Cuba
avec l'intrusion du castillan, donnant naissance à un dialecte
particulier que nous nommerons le créole cubain. Cette
transformation procède d'une dégradation du créole parlé au quotidien,
au profit du castillan, langue dominante sur l'île. La ségrégation des
immigrés de l'île de Saint-Domingue a accéléré ce processus. Pour la
plupart, ils étaient issus de milieux sociaux modestes, avec un faible
niveau d'instruction. Dès la fin du XIXe siècle, leur
arrivée massive est mal acceptée par les cubains. L'émancipation des
Noirs de la république d'Haïti naissante fait craindre des troubles
politiques. Plus tard, l'effondrement de l'économie sucrière, la quasi
disparition de la caficulture et de l'indigo créent une baisse des
besoins en main d’œuvre non qualifiée, mais les haïtiens continuent
d'affluer.
L'usage du créole comme langue de travail sur les propriétés
appartenant aux Français[3]
s'est perdu avec la dispersion des communautés haïtiennes. Il ne fut
alors utilisé que dans le cercle familial ou dans le contexte
religieux du vodou. A l'heure actuelle, quelques associations[4]
tentent de relancer l'usage de la langue créole, qui n'est plus parlée
au quotidien que par des personnes âgées. Le vodou et la vitalité de
groupes musicaux porteurs de la culture haïtienne maintiennent la
langue. Certains groupes folkloriques le font également, mais ne
jouent pas exclusivement le répertoire haïtien[5].
Ce patrimoine est également mis en avant par diverses manifestations
culturelles consacrées à la culture haïtienne de Cuba[6].
Selon le vécu, l'histoire familiale et le degré d'implication dans la
culture haïtienne des chanteurs dont sont issus les textes qui
suivront, la langue connaît des différences importantes. Nous nous
sommes attachés à respecter la graphie qu'ils utilisent.
Pour ce que nous appellerons tout du long le créole cubain,
sont absents certains marqueurs d'une structuration grammaticale,
rendant les textes parfois incompréhensibles pour un locuteur haïtien.
Cette transformation syntaxique et structurelle est la résultante de
chants portés par des artistes ne parlant plus ou peu le créole
d'Haïti, et de surcroît ayant l'oreille du castillan, langue
d'adoption ou langue maternelle. Il est notable que le sens donné aux
textes en créole cubain diffèrent parfois beaucoup du sens originel,
donnant alors naissance à un nouvel imaginaire propre à la culture
cubaine. C'est pourquoi nous parlerons alors de créole cubain. Chacun
des chants dans sa version créole haïtienne a déjà plusieurs niveaux
de lecture. Sont sédimentés parfois à l'intérieur du même texte, un
témoignage de la vie quotidienne, un fait historique ou politique, une
vision spirituelle et occulte. La nature intrinsèquement élusive de la
langue créole haïtienne permet bon nombre de jeux de mots et de
sens-tiroirs. Ceux-ci seront augmentés dans les versions cubaines des
chants, proposant parfois des significations très éloignées du sens
originel.
La mise en regard des trois entrées linguistiques, permet d'observer
l'évolution sémantique et lexicale de ce patrimoine oral exogène d'une
culture cubaine déjà riche en signes de multi-culturalisme.
Concernant la construction musicale des chants, et comme pour la
plupart de ceux du répertoire afro-cubain, elle est essentiellement
basée sur le principe de question/réponse entre un chanteur soliste et
un chœur. Il est rare que le chœur ne propose autre chose que la
reproduction du texte chanté auparavant par le soliste. Après
plusieurs échanges sur le même texte, le soliste peut choisir de le
couper, n'en utilisant plus qu'une partie et provoquant des réponses
du chœur plus rapprochées. Cet «élagage» peut intervenir
plusieurs fois sur le même paragraphe, provoquant une tension dans la
musique ainsi qu'une accélération de la pulsation.
Les mélodies du répertoire haïtien sont de nature très diverse, en
fonction de leur fonctionnalité et de leurs origines. Les contredanses
sont souvent sur le mode majeur et ressemblent par beaucoup à nos
mélodies européennes.
Les musiques de carnaval utilisent des mélodies courtes, faciles à
mémoriser et à reproduire par le public. L'utilisation de gammes
pentatoniques ou octophoniques dans les musiques religieuses du vodou
laisse transparaître leur filiation avec l'Afrique.
1. LES
CONTREDANSES
Au début
du XIXe
siècle, après avoir comblé les grandes cours d'Europe puis la
bourgeoisie cubaine, les contredanses furent adoptées par les Noirs
domestiques des français à Cuba[7].
A travers un instrumentarium musical qui se limitait souvent au chant
et à la percussion, ils réinterprétaient les mélodies gaies, les
chorégraphies gracieuses et les tempi moyens. Ce genre est tombé en
désuétude et n'est plus joué que par quelques groupes porteurs[8]
et compagnies folkloriques
.
1.1
ELIANSE
L'eliansé
s'exécute sur un cycle de trois temps et sur une vélocité moyenne.
Toutes les mélodies collectées sont sur le mode majeur.
Ce premier chant d'eliansé a pour sujet l'invitation à la danse
de l'assemblée.
LEVE
LEVE
Transmis par Santa Martinez Martinez de Lokosia
Créole
haïtien |
Français |
Leve
leve |
Levez-vous,
levez-vous |
Cette
histoire d'un protagoniste faisant tomber son chapeau vient d'une
chanson haïtienne à succès, Panama mwen tonbe[9].
Le sujet a fait florès, en passant du congo d'origine au merengué,
où ici à l'eliansé.
A LA JANJAN BODÈ
Transmis par Orlando Aramis Brugal Suarez de Babul
Créole
haïtien |
Français |
A
la Janjan bodè |
Ah
la la, Jeanjean est courbé |
Ce
texte met en avant Ibo Lele, un esprit du panthéon Ibo. Nous verrons
plus loin qu'un style musical particulier est employé pour célébrer
ces esprits[10].
Le champ lexical des Ibo se retrouve dans tous les styles musicaux,
comme ici dans l'eliansé.
IBO LELE
Transmis par Orlando Aramis Brugal Suarez de Babul
Créole
haïtien |
Français |
Ibo
Lele, Ibo Lele |
Ibo
Lele, Ibo Lele |
A
LA BÈL
Transmis par Andres Hodelin Lopez Mesye de Agüe
Créole
haïtien |
Français |
Manman
ou malonnèt |
Maman
vous êtes sans scrupules |
1.2
MINUE
L'eliansé
et le lété sont des créations des Noirs domestiques qui ont
remplacées progressivement le minué, contredanse d'origine
européenne. Le groupe Piti Dancé[11]
est
l'un des derniers à l'avoir encore à son répertoire. Le rythme du minué
se rapproche de celui de la yuba des sociétés de tumba
francesa, où tout les début de cycles sont accentués.
Le titre de la chanson suivante joue d’ambiguïté et de jeu de
mot sur menuet et minuit, heure propice à certaines cérémonies vodou,
petro et guédé.
MINUE SOLEO
Chant
transmis par Rafael Cisnero Lescay de Cutumba
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Minui
soleo
|
Minwi
sò lè o |
O,
minuit, l'heure des sorts
|
1.3 LÉTÉ
Le
lété est une danse de ronde à deux temps, de pulsation ternaire
et sur une vitesse est assez enlevée. Les mélodies sont toutes sur le
mode majeur.
Une mère souhaite retrouver sa fille. Elle en appelle à Ogoun
Batala, père des esprits de la famille des Ogoun, qui lui conseille
une grande piété.
OGUNBATALA LETE
Transmis par Fransisco Cisnero Lescay de Cutumba
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Ogunbatala
lete, belgazon |
Ogou
n'Batala l'èt e, bèl gason |
Notre
Ogoun Batala est un beau garçon |
Cette chanson est une variante de la précédente,
mais se fait plus précise sur la raison du désarroi de la mère: elle
a perdu sa fille, tombée dans la prostitution.
SI MANMAN VLE PITIT FIY
Transmis par Orlando Aramis Brugal Suarez de Babul
Créole
haïtien |
Français |
Si
manman vle pitit fiy |
Maman,
si vous voulez retrouver votre petite fille |
Le texte suivant raconte un amour contrarié, le narrateur voyeur
observant l'objet de ses convoitises se baignant à la rivière.
PWAL MA OU NAN DLO WA YO
Transmis par Orlando Aramis Brugal Suarez de Babul
Créole
haïtien |
Français |
A
pwal m'a ou nan dlo wa yo
|
Je
suis tout nu dans l'eau, ô Seigneur! |
1.4 POLKA
La polka
des contredanses haïtienne a la particularité de s'exécuter sur un
cycle rythmique variable. Il est induit par la longueur des phrases
chantées. Nous trouverons selon les cas des cycles à 5, 6 ou 7 temps.
Le dernier temps du cycle est marqué par un accent ou un arrêt. Les
mélodies sont sur le mode majeur.
L'invitation
à la danse au son d'une mélodie gracieuse, comme dans la bonne
société.
MADMWASEL
SA
Transmis par Santa Martinez Martinez de Lokosia
Créole
haïtien |
Français |
Madmwasel
sa, madmwasel sa |
Cette
demoiselle, cette demoiselle |
Le texte
suivant s'articule sur un cycle rythmique à six temps. Cela démontre
que la polka n'est pas un rythme figé, qu'il s'adapte à la durée des
phrases chantées. Le premier paragraphe est commun au texte
précédent.
MAMUASEL
SA VINI PUNU A DANCE
Chant
transmis par Rafael Cisnero Lescay de Cutumba
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Mamuasel
sa, mamuasel sa |
Madmwasèl
sa, madmwasèl sa |
Cette
demoiselle, cette demoiselle |
Partition
commune avec Madmwasel sa
La
chanson qui suit a la particularité de s'articuler sur un cycle
rythmique à sept temps, occurrence plutôt rare dans la musique
cubaine. Comme pour beaucoup de textes du champ sémantique vodou,
celui-ci est "à tiroirs". Il peut être compris comme la narration
d'une chorégraphie, mais aussi comme l'évocation d'esprits du
panthéon guédé.
MAMUASEL COMPE
Chant transmis par Rafael Cisnero Lescay de Cutumba
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Mamuasel
compe mamuasel con sa
|
Madmwasèl
kanpe, madmwasèl konsa |
Mademoiselle
debout! Mademoiselle comme cela |
1.5
VALS
Les
valses
haitiano-cubaines s'éxecutent sur un tempo modéré, pour préserver la
danse de
tout caractère trop extraverti. Elles reprennent en cela l'esprit des
chorégraphies européennes telles que les dansaient les exilés français
de l'île
de Saint Domingue.
Autour du champ sémantique d'un amour courtois, les airs suivant
invitent à
la danse.
LA BÈL SOUSÈL
Transmis
par Orlando Aramis
Brugal Suarez de Babul
Créole
haïtien |
Français |
La
bèl Sousèl, ri min a Lerison |
La
belle Sousel esquisse un sourire à Lerison |
CHANTE
A DANSE
Transmis par Orlando
Aramis Brugal Suarez de Babul
Créole
haïtien |
Français |
Chante
a danse, jusque vini soley |
De
chanter et danser jusqu'à l'aube |
Les références au
vodou
sont fréquentes dans les chansons profanes des danses de salon.
Dans cette première, le narrateur tente de rentrer en communication
avec les
esprits de l'au-delà. Dans la deuxième, des papillons sont chargés
de porter un
message sur la terre des ancêtres.
MADANM
KI JAN
Transmis
par Orlando Aramis
Brugal Suarez de Babul
Créole
haïtien |
Français |
Madanm
ki jan ki jan ki |
Madame
comment, comment faire |
DEMELE
TWA PAPIYON O
Transmis
par Orlando Aramis
Brugal Suarez de Babul
Créole
haïtien |
Français |
Demele
twa papiyon mue |
Travaillez
mes trois papillons** |
*
Nan
dlo: dans l'eau
ou sous l'eau. L'au-delà des vodouisant est
situé sous l'eau dans l'imaginaire populaire.
**
Les papillons sont la représentation de
l'esprit Lemò (la mort) pour les vodouisants.
2. GENRES CARNAVALESQUES ET APPARENTÉS
2.1
GAGA
Genre
musical rural qui se manifestait en Haïti originellement durant la
semaine sainte catholique. A Cuba au XXe siècle comme pour les
manifestations publiques de traditions africaines, les haïtiens
avaient l'autorisation de défiler avec leurs propres traditions,
durant les fêtes de carnaval[16]. Ils
nommèrent cela gaga pingué[17], un
style processionnel au tempo rapide, avec des mélodies gaies dans le
mode majeur. Un autre style de gaga utilise la même
instrumentation. Le gaga chay[18]
est
de vitesse lente ou moyenne, avec des chants sur le mode pentatonique
ou mineur. Le sujet des textes en fait vraisemblablement un genre à
l'origine d'usage religieux.
2.1.1
GAGA CHAY
La
colère d'un vodouisant face à l'adversité touchant son temple. Le
potomitan[19]
qui supportait sa bâtisse s'est effondré. Le langage relâché de la
fin est typique de certains esprits Guedé, pour qui grossièreté et
formules licencieuses sont signe de vitalité.
GUEDÉ
MANDE PU MUE
Chant
transmis par Rafael Cisnero Lescay de Cutumba
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Guedé
mande pu mue |
Gède
mande pou mwen
|
Guédé
je vous implore |
Ou
"comment prendre possession d'un vivant". On dit que la tête est le
réceptacle des esprits, quand ceux-ci veulent "chevaucher" un fidèle
lors d'un office vodou. Comme pour beaucoup d'autres chants de gaga
chay, il s'agit là d'une cérémonie pour les défunts, au cimetière.
AM
BELE TITON
Chant transmis par Vicente Portuondo du Conjunto Folkorico
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Am
bele titon mayawe |
Nanm
bèl e tit nonm[25]
maji a wè
Miton[26]
maji a wè
|
Ton
âme est belle petit homme, la magie tu vas voir |
Les
deux versions du chant suivant ont une base mélodique et des vers
communs. La première est plus ancienne et proche de l'original. Son
sujet religieux et mortifère en a certainement rebuté plus d'un
interprète. C'est certainement l'une des raisons de sa réinvention
(cf. version 2) qui narre simplement un fait divers.
MESA MINA PLE LE TEMO
Comme le chante Berta Armiñan avec Cutumba
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Mesa
mina prele temo |
Mezanmi
n'ap rele tè mò
|
Mes
amis je vous appelle sur la terre des morts |
E CUA E CUA
Comme le chante le groupe Ban Rara dans le CD Con sabor al
guaso
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
E cua e cua, e
cua e cua |
E kwa[34]
e kwa, e kwa e kwa |
Ô croix ô croix, ô croix![38],
|
Se
référer à la partition précédente MESA MINA PLE LE TEMO
2.1.2
GAGA PINGUÉ
Les
textes suivant incitent l'auditoire à rejoindre le
gaga pour le défilé.
Il est question dans cette première du « contremaître »,
le chef de
la troupe de gaga.
WE ZO
Transmis
par Andres
Lopez Hodelin "Mesye", du groupe Agüe
Créole
haïtien |
Français |
Ou
we zo mayor[*]
gaga pa la tonbe |
Si
vous voyez le chef-gaga choir |
CHÈ
YO LEVE SOU CHÈZ
Transmis
par Andres
Lopez Hodelin Mesye, du groupe Agüe
Créole
haïtien |
Français |
Chè
yo leve sou chèz |
Chers
vous,
levez-vous de votre chaise |
[*]
Cubanisme.
Contremaître
dans une exploitation agricole ou industrielle. Par extension, la
personne dirigeant la musique et chorégraphie déambulatoire d'une
troupe de
gaga
Le
narrateur du chant suivant est encore
le chef gaga, ou "mayoral", qui donne ses dernières recommandations
avant le départ du défilé
AY A LASO
Transmis
par Leonardo Maximo Luis Lionel,
du groupe Caidijé
Créole
haïtien |
Français |
Ay
a laso pa bliye sa m'te di ou la |
Allons-y,
n'oubliez pas ce que je vous ais dit |
Les
orages sont fréquents durant l'été à
Cuba, suite à des pics de fortes chaleurs. Ils perturbent mais
n'arrêtent pas
pour autant les activités de carnaval qui ont lieu à cette saison.
LA
WOUZE
Transmis par Nancy Aviles Lopez du groupe La Bèl Kreyol
Créole
haïtien |
Français |
La
wouze[*]
o ban m' pase |
Ô
l'ondée,
laisses-moi passer |
[*]
Une traduction littérale donnerait "la
rosée", mais de correspond pas au sens donné au mot en créole.
Toujours dans l'idée de bambocher avec la colonne de gaga, voici un chant qui identifiela troupe en question
LOKOSIA YO DI
Transmis par Santa Martinez Martinez de Lokosia
Créole
haïtien |
Français |
Lokosia yo di a se jou mwen |
Lokosia, je le dis à ce jour |
Texte
un peu évasif, mais justifiant le mouvement et
l'agitation de la troupe de gaga
ELE
LE JAN TO
Transmis
par Nancy Aviles Lopez du
groupe La Bèl Kreyol
Créole
haïtien |
Français |
E
le le |
Et
quand? |
Les
proverbes, jeux de mots et railleries sont
fréquent dans le gaga pingué, incitant à la fête toutes personnes
l'écoutant.
PA SA VENI O
Transmis par Santa Martinez Martinez du groupe Lokosia
Créole
haïtien |
Français |
Pa sa veni o woy[52]
|
Ô ce
n'est pas prêt d'arriver, woy! |
PINDA MAYE
BOMBO
Chant
transmis par Vicente Portuondo du Conjunto Folkorico de Oriente
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Pinda[53]
maye bombo |
Pinga
mani yè bon mò |
Attention
aux promesses d'hier, aux bons mots |
Ce chant très
populaire connaît de multiples variantes[55],
plus ou moins sensationnelles et salaces autour du même leitmotiv,
l'incitation à la fête.
BON BO IMÈ PARADE
Comme le chantent Lokosia à Guantanamo
https://youtu.be/VDucaAV1Jv4
(aller à 21'10)
Créole
haïtien |
Français |
Bon
bo |
C'est
bon, c'est beau |
Le narrateur vante ici ses capacités de séduction de manière très crûe. Beaucoup de chants de gaga sont dans la même veine.
MAYORAL
Transmis
par Nancy
Aviles Lopez du groupe La Bèl Kreyol
Créole
haïtien |
Français |
Mayoral
o w voye m' ale |
Et
oui chef,
voyez-vous c'est ainsi |
Toujours sur le registre de la chanson paillarde, la narratrice du
texte
suivant rechasse l'un de ses prétendants avec force railleries.
PASE
M'BA OU LI
Transmis
par Nancy
Aviles Lopez du groupe La Bèl Kreyol
Créole
haïtien |
Français |
Pase
m'ba ou li m' |
Avant
que je me donne à toi |
Les chants de gaga suivant jouent à faire peur, avec les
diables, zombis, loup-garous, et autres croque-mitaines caribéens.
Ils font l'objet de costumes et masques grimaçants lors des défilés
de carnaval.
LOUGAWOU O
Transmis par Santa Martinez Martinez de Lokosia
Créole
haïtien |
Français |
Lougawou[57]
o |
Ô Loup-garou |
GADE DYAB LA
Transmis par Santa Martinez Martinez de Lokosia
Créole
haïtien |
Français |
Danbala Wèdo se sa e |
Danbala Wedo c'est cela |
DYAB TONBE
Transmis par Santa Martinez Martinez de Lokosia
Créole haïtien
|
Français |
Dyab tonbe m'ap pe woule |
Les diables descendent, je peux rouler |
FEY O ÈL E FEY
Transmis par Santa Martinez Martinez de Lokosia
Créole haïtien
|
Français |
Fey o èl e fey
|
Les feuilles
là-haut, sur les feuilles, des ailes |
YA
BOSEA TIBULE LAE
Chant
transmis par Rafael Cisnero Lescay de Cutumba
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Ya
bosea tibule lae |
Ay
o se a ti boule la e
|
Houla,
que cela brûle, aé! |
IBONO
Chant
transmis par Rafael Cisnero Lescay de Cutumba
Créole
cubain |
Créole
haïtien |
Français |
Ibo
no Ibo no, Ibo no |
Ibo
nou Ibo nou Ibo nou |
Nos
dieux Ibo |
Les
proverbes, jeux de mots et railleries sont fréquent dans le gaga
pingué, qui doit entraîner à la fête toutes personnes l'écoutant. On
bamboche soit en défilant au son des baksin[51],
soit en statique sur les places et les cours intérieures.
Les deux textes de gaga qui suivent rentrent dans le
champ sémantique du religieux, l'un du vodou et l'autre du
christianisme.
LAKAY E
Transmis
par Andres
Lopez Hodelin Mesye, du groupe Agüe
Créole
haïtien |
Français |
Lakay
e, ou o ou o |
Mes
frères, vous ô, vous ô, |
SETANDE
PA M' FE BYEN
Transmis
par Leonardo
Maximo Luis Lionel, du groupe Caidijé
Créole
haïtien |
Français |
Setande[***]
pa m' fe byen a ka e |
Saint
André, je ne suis pas tout à fait au courant |
[*]
Ou
Gède
Nibo, esprit androgyne de la famille des Gède. Les Gède font
partie du
domaine de la mort et de la fertilité, thématiques récurrentes
dans les chants
de gaga
[**]
La couleuvre est la représentation des
esprits Dambala et Ayisan du rite vodou Danwonmen
[***]
Déformation
de
Sènt Ande, qui serait l'orthographe créole haïtienne
conventionnelle
2.2 KANEKELA
La kanekela
est un genre musical rural de défilé au tempo soutenu.
Originaire du Nord d'Haïti, il est désormais peu joué, on lui préfère
le gaga pingué, plus facile d'accès.
Cabinda est une ville du nord de l'Angola actuel, correspondant
à l'une des provinces de l'ancien royaume de Loango à l'époque de la
traite négrière.
DE CABINDA KUNENE
Chant transmis par Rafael Cisnero Lescay de Cutumba